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Manuel de Néphrologie 10° édition
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Fiche Flash

Données épidémiologiques

La lithiase urinaire est une affection très fréquente puisque sa prévalence est d’environ 5 % à 10 % dans les pays industrialisés.

La maladie récidive dans 50 % des cas dans les 5 ans en l’absence de traitement préventif.

La lithiase calcique représente plus de 80 % des lithiases urinaires. Les autres lithiases urinaires sont constituées d’acide urique (10 %), de struvite (lithiase d’infection, 5 %) ou de composés rares (cystine, xanthine, médicamenteuses…).

Données physiopathologiques

1. La formation d’un calcul dans l’appareil urinaire est toujours la conséquence d’une augmentation de la concentration des composés (sels de calcium, acide urique, cystine…) au-dessus du seuil de solubilité du sel dans l’urine (on parle de sursaturation).

2. La lithiase calcique est idiopathique dans 90 % des cas. Un bilan biologique sanguin et urinaire simple permet d’éliminer les causes secondaires (hyperparathyroïdisme, acidoses tubulaires, hyperoxalurie primaire…).

Diagnostic d’une lithiase urinaire

1. La principale manifestation d’une lithiase urinaire est la colique néphrétique.

2. Une prise en charge urologique en urgence (dérivation des urines) est justifiée en cas de colique néphrétique (i) fébrile ou (ii) anurique.

3. Le diagnostic radiologique de la lithiase repose sur l’ASP (calculs radio-opaques), l’échographie et la tomodensitométrie urinaire sans injection (calculs radio-opaques ou radio-clairs).

4. Les calculs radio-opaques sont constitués de calcium (oxalate et phosphate de calcium, struvite) ou de cystine (même si moins radio-opaques). Les calculs radio-transparents sont de nature urique.


Traitement de la colique néphrétique et des calculs urinaires en place

1. Les AINS sont le traitement de référence de la colique néphrétique.

2. Les moyens urologiques de traitement curatif des calculs sont :

— la lithotritie extracorporelle ;

— les techniques endoscopiques : urétéroscopie et néphrolithotomie percutanée ;

— la chirurgie conventionnelle (calculs coralliformes, échecs des autres techniques).

3. Les calculs d’acide urique peuvent être traités par alcalinisation.

Facteurs de risque de lithiase

1. Trois types de facteurs de risque ont été identifiés :

— les facteurs génétiques (fréquence des cas familiaux de la maladie) ;

— les facteurs urologiques (stagnation des urines) au premier rang en particulier l’ectasie canaliculaire précalicielle (Cacchi-Ricci) ;

— les facteurs diététiques et métaboliques : volume de diurèse insuffisant, hypercalciurie, hyperoxalurie, hyperuricurie et hypocitraturie.

2. L’hypercalciurie (> 0,1 mmol/kg/j) peut être secondaire à une hypercalcémie (hyperparathyroïdie primaire…) ou avoir une cause connue (diurétiques de l’anse…), mais le plus souvent elle est idiopathique. L’hypercalciurie idiopathique est favorisée par des apports alimentaires trop élevés de calcium et/ou de NaCl et/ou de protéine.

3. L’hyperoxalurie est le plus souvent idiopathique.

4. L’hyperuricurie favorise la lithiase de calcium en diminuant la solubilité de l’oxalate de calcium.

5. L’hypocitraturie favorise la lithiase car le citrate est un inhibiteur de la lithiase calcique.

Traitement médical préventif de la lithiase calcique idiopathique

1. Principes généraux du traitement :

— le principal traitement est l’hyperdiurèse (+++) ;

— il doit être adapté à l’intensité de la maladie lithiasique (diurèse et régime dans un 1er temps puis médicaments).

2. Le traitement associe :

— cure de diurèse avec boissons réparties sur le nycthémère ;

— en cas d’hypercalciurie : régime apportant 1 g/j de calcium, restreint en NaCl et en protéines ; diurétique thiazidique si maladie évolutive et hypercalciurie résistante ;

— en cas d’hyperoxalurie : régime pauvre en oxalate ;

— en cas d’hyperuricurie : régime pauvre en purine ; allopurinol en cas d’échec ;

— en cas d’hypocitraturie : régime riche en alcalins (fruits et légumes), citrate médicinal en cas d’échec.

Physiopathologie et traitement de la lithiase urique

1. La lithiase urique est le plus souvent idiopathique en rapport avec une hyperacidité des urines sans hyperuricémie ou hyperuricurie.

2. Les formes secondaires sont rares et en rapport avec une goutte primitive ou des maladies hématologiques (leucémies…). Elles s’accompagnent d’hyperuricémie et d’hyperuricurie.

3. Le diagnostic des calculs (qui sont radio-clairs) repose sur l’échographie ou la tomodensitométrie.

4. L’acide urique est très soluble dès que le pH des urines est > à 6.

5. Le traitement préventif de la lithiase urique primitive repose sur :

— la cure de diurèse ;

— l’alcalinisation des urines (eau de Vichy, HCO3, citrate).

Physiopathologie et traitement de la lithiase cystinique

1. La lithiase cystinique (1 % des lithiases urinaires) est la seule manifestation d’une maladie héréditaire autosomique récessive se traduisant par une élévation de la concentration urinaire de cystine à l’origine de calculs urinaires récidivants.

2. Les calculs sont faiblement radio-opaques ; le diagnostic est posé par l’analyse des calculs et le dosage de la cystine urinaire.

3. Le risque d’insuffisance rénale chronique est réel du fait des complications des calculs (obstacle, infections) et des interventions urologiques.

4. Le traitement de première intention repose sur la dilution et l’alcalinisation des urines, le régime hypoprotidique, désodé et pauvre en méthionine. La prise en charge se fait en milieu spécialisé.

Physiopathologie et traitement de la lithiase de struvite (phosphate ammoniaco-magnésien)

1. La physiopathologie de cette lithiase est sous la dépendance d’infections urinaires à germes uréasiques (Protéus, Klebsiella…) à l’origine d’un pH urinaire très alcalin favorisant la précipitation du NH4 avec le phosphate et le magnésium. Avec le temps, les calculs de struvite se chargent en calcium et deviennent radio-opaques.

2. Ces calculs sont souvent très volumineux et moulent les calices (d’où leur appellation corraliforme).

3. Le traitement repose sur l’ablation complète des calculs par les techniques urologiques et par la stérilisation des urines.

Prise en charge de la lithiase urinaire


1. Évaluation initiale

Le bilan doit être effectué au moins 1 mois après un épisode obstructif et 3 mois après un traitement par lithotritie extracorporelle.

Il comporte : analyse d’un calcul, NFS, VS, créatininémie, ionogramme sanguin, calcémie, albuminémie, phosphorémie, uricémie ; diurèse des 24 heures ; mesures du pH urinaire ; sur les urines des 24 heures : urée, ionogramme urinaire, calciurie, phosphaturie, uraturie ; ECBU.

L’imagerie associera ASP, échographie rénale et des voies urinaires, TDM injecté ou, à défaut, urographie intraveineuse.

Selon l’orientation clinique, seront réalisés : électrophorèse des protides, dosage de la parathormone, de la 1,25 hydroxy-vitamine D, réaction de Brandt urinaire, aminoacidogramme urinaire, citraturie et oxalurie des 24 heures, magnésurie des 24 heures, épreuve de charge calcique, épreuve d’acidification urinaire.


2. Lithiase urique (ou uratique)

Elle peut s’intégrer dans le tableau d’une maladie goutteuse mais se présente souvent isolée. Le pH urinaire est en permanence acide (élément majeur du diagnostic). Une hyperuricémie ou une hyperuraturie ne sont pas toujours associées.

Les calculs peuvent être dissous par alcalinisation urinaire ou détruits par lithotritie.

Traitement préventif des récidives : cure de diurèse > 2 litres par jour et alcalinisation des urines (bicarbonate de sodium 4 à 6 g par jour ou eau de Vichy). L’allopurinol a démontré son efficacité préventive.


3. Lithiase oxalocalcique

C’est la plus fréquente (70 %). Les calculs ne peuvent pas être médicalement dissous. En fonction de leur taille, on peut espérer une élimination spontanée (calcul < 5 mm), ou recourir à la lithotritie ou à la chirurgie (calcul > 5 mm).

Le traitement préventif des récidives comprend des boissons abondantes permettant une diurèse > 2 litres par jour et repose sur 3 mesures diététiques : restriction modérée en protéines animales (1 g/kg par jour), restriction modérée en chlorure de sodium (4 à 5 g par jour) et régime normal en calcium (800 à 1 200 mg par jour). En cas d’hyperoxalurie, limiter les apports en oxalates (voir Conseils aux patients).

4. Lithiase oxalocalcique récidivante

Après vérification de la compliance aux règles hygiénodiététiques, un traitement de fond peut être indiqué : diurétiques thiazidiques (hydrochlorothiazide, indapamide) hors AMM, allopurinol, citrate de potassium.


Cas particuliers

Autres lithiases radio-opaques

La lithiase phosphocalcique représente 10 à 20 % des lithiases. Elle a pour principale origine une alcalinité chronique des urines et survient donc préférentiellement sur certains terrains : diarrhée chronique, iléostomie, abus de laxatifs, traitement par l’acétazolamide. Le traitement curatif est la chirurgie. La prévention repose sur la prise en charge de sa cause et l’éventuelle acidification des urines.

La lithiase cystinique est l’expression clinique de la cystinurie, anomalie héréditaire du transport rénal et intestinal de la cystine. Elle représente 1 à 2 % des calculs observés chez l’adulte, et près de 10 % de ceux observés chez l’enfant. L’affection est transmise sous forme autosomique récessive. Les calculs cystiniques sont faiblement radio-opaques, en taches de bougie, et souvent résistants à la lithotritie. Outre la présence de ces calculs, le diagnostic repose sur le dosage de la cystine urinaire supérieure à 2 mmol/jour et l’échographie rénale. Il s’agit d’une lithiase grave, justifiant un avis spécialisé. Le traitement inclut la limitation de l’apport protéique riche en méthionine, la dilution et l’alcalinisation des urines. La diurèse doit être maintenue au-dessus de 3 litres par jour et le pH urinaire autour de 7,5. L’alcalinisation des urines est obtenue par l’administration de citrate de potassium (6 à 8 g par jour) ou de bicarbonate de sodium. Si ces mesures s’avèrent insuffisantes, on dispose de deux médicaments : la tiopronine et la D-pénicillamine (ANSM, août 2017). La lithotripsie extracorporelle est peu efficace du fait de la consistance des calculs de cystine. Une fragmentation des calculs de taille plus élevée par laser, voire une néphrolithotomie percutanée, est alors nécessaire.

La lithiase phospho-ammoniaco-magnésienne ou coralliforme, qui représente moins de 2 % des calculs, est plus fréquente chez les femmes. Elle est favorisée par la présence d’une infection urinaire par un germe doté d’une uréase, tel que Proteus ou Ureaplasma urealyticum. Le traitement repose sur l’ablation de la masse lithiasique et sur l’éradication de l’infection par une antibiothérapie prolongée.

Lithiases de cause médicamenteuse

Le principal médicament responsable de lithiases est la sulfadiazine. L’acétazolamide (calcium), les uricosuriques (acide urique) et la vitamine C (oxalates) peuvent également jouer un rôle dans la lithogenèse.

Lithiases et anomalies anatomiques

Certaines anomalies morphologiques de l’appareil urinaire entraînent une stase des urines qui favorise la formation de calculs : rein en fer à cheval, hydronéphrose congénitale par sténose de la jonction pyélo-urétérale, diverticules caliciels et surtout ectasies tubulaires précalicielles ou maladie de Cacchi-Ricci. Une anomalie métabolique associée, telle qu’une hypercalciurie, doit toujours être recherchée et traitée.

Hyperoxalurie primitive de type 1 (HP1)

L’hyperoxalurie primitive de type 1 est une maladie rare, autosomique récessive. Le déficit de l’enzyme hépatique alanine glyoxylate aminotransférase (AGT) conduit à une surproduction d’oxalate qui se dépose dans le rein et les voies urinaires. Les symptômes apparaissent à un âge médian de 6 ans. La présentation clinique varie de la néphrocalcinose infantile, particulièrement sévère avec une insuffisance rénale précoce, à des lithiases rénales récidivantes chez l’enfant ou à l’âge adulte. Lire Maladies rares.

Conseils aux patients

La cure de diurèse consiste en la prise abondante de boissons, de façon à maintenir la diurèse des 24 heures autour de 2 à 3 litres par jour.

Le régime adapté à la nature de la maladie lithiasique peut associer : une restriction modérée en protéines animales (Lire Diététique : Insuffisance rénale chronique avant le stade de la dialyse et hors transplantation), une restriction modérée en chlorure de sodium (Lire Diététique : Régime désodé), un régime normal en calcium (entre 800 et 1 200 mg par jour), dont la moitié au moins sous forme de produits laitiers. En cas d’hyperoxalurie, il est conseillé de limiter les apports en oxalates : éviter les fruits secs et les oléagineux, les épinards, la rhubarbe, le cresson, le fenouil, l’oseille, le cassis, les groseilles, les framboises, le persil et la moutarde en grande quantité, le thé longuement infusé, le café soluble, le chocolat, les apports médicamenteux de vitamine C.

En cas de lithiase récidivante, un suivi médical est absolument nécessaire afin de réaliser une imagerie périodique pour évaluer la croissance ou la formation de novo d’un calcul, et dans le but d’éviter les complications qui peuvent s’installer à bas bruit.

Des fiches d’information, décrivant les règles diététiques à appliquer et destinées aux patients, sont