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Chapitre 21 Infections urinaires de l’enfant et de l’adulte Item 161

N° 161. Infections urinaires de l’enfant et de l’adulte

Chapitre 21 Item 161 Infections urinaires de l’enfant et de l’adulte

Ce chapitre s’appuie sur les recommandations de la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française (SPILF) :
«  Recommandations pour la prise en charge des infections urinaires communautaires de l’adulte  » (2018)
«  prise en charge des infections urinaires de l’enfant  » (recommandations conjointes avec le Groupe de Pathologie Infectieuse Pédiatrique de la Société Française de Pédiatrie, 2015)
«  recommandations de bonnes pratiques : infections urinaires au cours de la grossesse  » (2015)
«  recommandations de bonne pratique pour la prise en charge et la prévention des infections urinaires associées aux soins de l’adulte  » (2015)

Rang Rubrique Intitulé Descriptif
A Définition Savoir définir les différents types d’infections des voies urinaires simples ou à risque de complication et leur fréquence respective Distinguer cystite, pyélonéphrite, infections urinaires simples (femme jeune sans facteur de risque), graves et infections urinaires à risque de complication, infections urinaires masculines, cystites récidivantes et recherche de facteurs de risque de complication
A Étiologies Connaître les principaux agents pathogènes à l’origine des infections urinaires et les principaux mécanismes de résistance aux antibiotiques Connaître les résistances aux antibiotiques de E. coli communautaire, connaître les facteurs de risque de résistances aux fluoroquinolones et aux -lactamines
A Examens complémentaires Indications des examens complémentaires de première intention en fonction du type d’infection urinaire BU, ECBU, Échographie
B Examens complémentaires Indications des examens complémentaires de deuxième intention en fonction du type d’infection urinaire Scanner, IRM, cystographie, cystoscopie, scintigraphie
A Examens complémentaires Connaître les principes de réalisation de la bandelette urinaire et son interprétation
A Examens complémentaires Connaître les principes de réalisation et l’interprétation de l’ECBU L’interprétation des résultats, dont les seuils significatifs des bactériuries, les indications et quand ne pas faire d’ECBU systématique, connaître les causes de leucocyturie aseptique
A Définition Connaître la définition d’une colonisation urinaire Connaître les mécanismes des colonisations urinaires, dont colonisation de sonde urinaire
A Diagnostic positif Connaître les critères diagnostiques des cystites aiguës (simple, à risque de complication) Connaître le potentiel évolutif des cystites aiguës simples ; savoir éliminer les diagnostics différentiels
A Diagnostic positif Connaître les critères diagnostiques des pyélonéphrites aiguës (clinique, biologiques, radiologique) avec ou sans signe de gravité (algorithme) Connaître la différence entre une pyélonéphrite simple et à risque de complication, savoir reconnaître les risques de complications d’une pyélonéphrite, connaître les examens complémentaires à réaliser au cours d’une pyélonéphrite, en urgence, en différé, savoir poser l’indication d’un recours ; savoir éliminer les diagnostics différentiels
A Prise en charge Connaître le traitement des cystites aiguës simple dont suivi et prévention des récidives
A Prise en charge Connaître le traitement des pyélonéphrites aiguës simple
B Prise en charge Connaître le principe de la prise en charge des pyélonéphrites aiguës compliquées
A Diagnostic positif Connaître les critères diagnostiques des infections urinaires masculines (clinique, biologiques, radiologique) Savoir poser les indications des examens complémentaires des infections urinaires masculines, connaître les complications des infections urinaires masculines, savoir éliminer les diagnostics différentiels
A Prise en charge Connaître le traitement des infections urinaires masculines et connaître les modalités de leur prévention Connaître les conditions de prise en charge urologique des infections urinaires masculines
A Prise en charge Connaître le traitement des infections urinaires au cours de la grossesse et son suivi Connaître les modalités de suivi des infections urinaires au cours de la grossesse ; savoir éliminer les diagnostics différentiels
A Prise en charge Connaître les spécificités de l’infection urinaire de la personne âgée Indications ECBU, observance
A Diagnostic positif Savoir évoquer une infection urinaire de l’enfant : enquête clinique Situations et symptômes devant faire évoquer le diagnostic, Critères diagnostiques d’une infection urinaire de l’enfant (haute, basse), savoir éliminer les diagnostics différentiels
A Examens complémentaires Savoir prescrire le ou les examens complémentaires chez l’enfant Particularités du recueil des urines, indications de la bandelette urinaire, de l’ECBU, de l’échographie rénale, Critères diagnostiques d’une infection urinaire de l’enfant (haute, basse)
A Prise en charge Prise en charge thérapeutique d’une infection urinaire de l’enfant
B Examens complémentaires Connaître les examens complémentaires à réaliser dans les infections urinaires récidivantes Connaître les étiologies, les facteurs favorisants, et les examens complémentaires, (cystographie, cystoscpie, scanner) à réaliser
B Prise en charge Connaître les principes du traitement des cystites récidivantes (curatif médical, préventif) Dont cystites post-coïtales, mesures hygièno-diététique, indication et surveillance des traitements prolongés
B Prévalence, épidémiologie Infections urinaires de l’enfant : épidémiologie

I. Outils permettant la détection d’une bactérie dans l’urine (A)

A. La bandelette urinaire (BU)

[violet]1. Principe et seuils de détection[/violet]

Il s’agit d’une languette comportant plusieurs carrés de papier buvard imprégnés de réactifs changeant de couleur en fonction de la présence de certains composants dans l’urine. La bandelette doit être trempée dans l’urine fraîchement émise, dans un récipient propre mais pas nécessairement stérile.

Les bandelettes réactives détectent :

la leucocyte estérase produite par les polynucléaires neutrophiles présents dans l’urine. Le seuil de sensibilité est de 104 leucocytes/ml ;

les nitrites qui témoignent de la présence de bactéries, essentiellement les entérobactéries, qui expriment une nitrate réductase capable de transformer les nitrates en nitrites. Le seuil de détection des nitrites est assez élevé, correspondant très approximativement à 105 unités formant colonie (UFC) ml (plus bas sur certaines BU). Ceci explique donc que les nitrites puissent être absents en cas de faible bactériurie.

[violet]2. Interprétation de la BU
[/violet]

Une bandelette est dite «  négative  » si elle ne montre ni leucocytes, ni nitrites. Chez la femme, en l’absence d’immunodépression (neutropénie en particulier), une BU négative a une très bonne valeur prédictive négative (> 95 %). Chez l’homme au contraire, une BU positive a une très bonne valeur prédictive positive (> 90 %) et est en faveur d’une infection urinaire. Une BU négative chez l’homme n’élimine pas le diagnostic.

La bandelette est positive si elle détecte des nitrites et/ou des leucocytes. Chez une femme symptomatique, une BU positive suffit au diagnostic de cystite aiguë simple. Chez l’homme, une BU positive conforte le diagnostic d’infection urinaire mais doit être confirmée par un ECBU.

Les causes de faux négatifs sont résumées dans le tableau 1.

Tableau 1. Causes de faux-négatifs de la bandelette urinaire

Absence de nitrites Absence de leucocytes
Bactéries n’exprimant pas de nitrate réductase :
Staphylococcus saprophyticus
Streptocoques et entérocoques
Acinetobacter
Immunodépression, neutropénie Infections urinaires masculines
Faible bactériurie
pH urinaire acide
Diurétiques et urines diluées
Infections urinaires masculines

B. L’examen cytobactériologique des urines (l’ECBU) (A)

[violet]1. Technique de recueil[/violet]

L’ECBU a pour objectif de recueillir l’urine vésicale en limitant sa contamination lors de la miction par la flore commensale qui colonise l’urètre et la région périnéale.

L’ECBU est indiqué devant toute suspicion d’infection urinaire, sauf en cas de cystite aiguë simple.

Les deux indications de l’ECBU systématique (c’est-à-dire en l’absence de symptôme) sont :

la femme enceinte : ECBU mensuel systématique à partir du 4e mois de grossesse ;

la chirurgie programmée sur les voies urinaires.

Il n’y a pas lieu de faire un ECBU systématique dans les situations suivantes :

présence de matériel endo-urinaire à demeure : sonde vésicale même avant pose ou ablation, stent uréthral (prothèse de «  Fabian  »), sonde urétérale ;

contrôle de la guérison d’une infection urinaire dont l’évolution clinique a été favorable (sauf chez la femme enceinte : ECBU une semaine après un épisode d’IU et mensuels).

Les conditions de recueil de l’urine doivent être optimales pour que le résultat de l’ECBU soit fiable :

nettoyage du méat urinaire avec un antiseptique ;

élimination du premier jet de la miction et récolte du milieu de la miction ;

acheminement rapide de l’échantillon au laboratoire ou conservation à 4 °C jusqu’à son acheminement.

Lorsque le patient ne peut coopérer, l’urine peut être récoltée par sondage «  aller-retour  » chez la femme ou par mise en place d’un collecteur pénien chez l’homme. Lorsqu’une sonde vésicale est en place, celle-ci doit être clampée une dizaine de minutes et l’urine est récupérée par ponction de l’opercule de la sonde après l’avoir désinfecté.

2. Interprétation de l’ECBU

L’ECBU comprend :

le compte cytologique : nombre de leucocytes et d’hématies par ml ou mm3, aussi appelé «  sédiment urinaire  ». La leucocyturie est considérée comme significative lorsqu’elle est ≥ 104/ml (ou 10/mm3) ;

l’analyse bactériologique :

comporte dans un premier temps un examen microscopique direct urinaire après coloration de Gram. Le seuil de détection des bactéries par l’examen direct est élevé : de l’ordre de 105 UFC/ml. Un examen direct négatif n’élimine donc pas une IU,

puis l’urine est mise en culture. L’analyse inclut l’identification et le compte des bactéries présentes dans l’urine exprimé en UFC/ml,

l’identification bactérienne est systématiquement couplée à un antibiogramme lorsqu’une bactérie dominante a été identifiée (les flores polymicrobiennes reflètent en général une contamination de l’ECBU) et que cette bactérie est potentiellement uropathogène (les bactéries commensales de la peau ou de la flore vaginale de type bacille à Gram positif de Döderlein ne font pas l’objet d’un antibiogramme).

Chez un patient avec leucocyturie significative, les seuils de bactériurie significative dépendent du sexe, de l’espèce bactérienne et de la situation clinique (tableau 2).

Tableau 2. Seuils de bactériurie significative selon le contexte clinique

Situation clinique Seuil
Recueil urinaire directement dans la vessie ou le bassinet* 102 UFC/ml
Miction spontanée chez l’homme quelle que soit la bactérie 103 UFC/ml
Miction spontanée chez la femme, isolement d’E. coli ou de S. Saprophyticus
Miction spontanée chez la femme, autres bactérie 104 UFC/ml
Bactériurie asymptomatique chez la femme enceinte 105 UFC/ml
Recueil urinaire sur sonde vésicale

* recueil urinaire par sondage aller-retour, ponction sus-pubienne, ou ponction pyélique.
Dans ces cas, toute bactériurie doit être considérée comme significative.
Le seuil de détection des laboratoires de microbiologie est habituellement de 102-103 UFC/ml.

Les causes de leucocyturie sans identification de bactérie sont résumées dans le tableau 3.

Tableau 3. Leucocyturie sans bactérie détectée par l’ECBU

Causes infectieuses Leucocyturies aseptiques
Bactéries non détectées par les techniques de culture habituelles* : Mycobacteries du complexe tuberculosis, Chlamydia trachomatis, Mycoplasma hominis Contamination urinaire par des leucocytes vaginaux
nfections décapitées par une antibiothérapie Néphropathies interstitielles
Tumeurs urothéliales
Cystites non infectieuses : calculs, cystite radique, cystite interstitielle
Néo-vessies iléales ou coliques

* les mycobactéries nécessitent un milieu de composition spéciale pour être cultivées. Les Chlamydia et les ­mycoplasmes sont des bactéries intracellulaires qui ne poussent donc pas dans les milieux acellulaires.

II. Étiologie (A)

A. Les agents pathogènes

De nombreux micro-organismes peuvent être responsables d’infections urinaires, mais les bacilles à Gram négatif de la famille des entérobactéries — avec en premier lieu Escherichia coli sont de loin les plus courants.

Le réservoir bactérien des infections urinaires est le plus souvent le tube digestif. Le tableau 4 énumère les agents infectieux le plus souvent responsables d’infections urinaires.

Tableau 4. Agents pathogènes

Microorganisme Population Particularités
Escherichia coli* 50 à 90 % de toutes les IU Importance de l’antibiorésistance (cf. infra)
Proteus mirabilis* 10 % des cas communautaires Bactéries à uréase, favorise les lithiases
Staphylococcus saprophyticus 3 à 7 % des cas communautaires Femme jeune après rapport sexuel
Entérocoques Résistance naturelle
à toutes les céphalosporines et aux quinolones
Peut accompagner une entérobactérie sans être obligatoirement pathogène
Klebsiella*, Pseudomonas aeruginosa, Serratia marcescens* Infections hospitalières Bactéries souvent résistantes
Sonde à demeure, sujets diabétiques ou immunodéprimés
Staphylocoque doré Infections hospitalières Septicémie
Tuberculose Populations migrantes Leucocyturie sans bactériurie. La tuberculose urinaire est exceptionnelle
Candida albicans, Candida tropicalis Infections hospitalières Sonde à demeure
Sujets diabétiques
Après antibiothérapie à large spectre
La candidurie n’est pas toujours pathogène et ne nécessite pas obligatoirement de traitement

* entérobactéries

B. Principaux mécanismes de résistance aux antibiotiques d’Escherichia coli

Fréquence Antibiotique Mécanisme Remarque
< 5 % Fosfomycine, nitrofurantoine, aminosides
5 % C3G Expression d’une BLSE principalement FDR : voir ci-dessous
10 % Fluoroquinolone Mutation dans les gènes des topoisomérases FDR : prise de quinolone dans les 6 mois précédents
Pivmecillinam Possiblement efficace sur les souches BLSE Cystites uniquement
10-20 % Amoxicilline + acide clavulanique Variés : pénicillinase fortement exprimée, pénicillinase insensible à l’acide clavulanique, céphalosporinase, BLSE .
. Triméthoprime et cotrimoxazole . .
 20 % Amoxicilline Sécrétion d’une pénicillinase .

Facteurs de risque d’infection à Escherichia coli exprimant une BLSE :

colonisation urinaire ou IU à EBLSE dans les 6 mois précédents ;

antibiothérapie par pénicilline et inhibiteur de pénicillinase, céphalosporine de 2e ou 3e génération, ou fluoroquinolone dans les 6 mois précédents ;

voyage récent en zone d’endémie d’EBLSE : Asie du sud-Est (Inde en particulier), Moyen Orient (Israël), Afrique, Italie, Grèce, Portugal ;

hospitalisation dans les 3 mois précédents ou vie en établissement de long
séjour.

III. Nomenclature (A)

A. Infection à risque de complication

Une infection urinaire est dite à risque de complication si elle comporte au moins un des facteurs de risque pouvant rendre l’infection plus grave ou le traitement plus compliqué (tableau 5).

Tableau 5. Facteurs de risque de complication des infections urinaires

Facteur de risque Complément d’information
Anomalie anatomique ou fonctionnelle de l’arbre urinaire Reflux vésico-urétéral, syndrome de la jonction urétéro-pyélique, polykystose rénale, résidu post-mictionnel, antécédent de chirurgie urologique (dont transplantation rénale), tumeur, lithiase ou corps étranger dans les voies urinaires
Sexe masculin
Sujet âgé de plus de 75 ans
Sujet de plus de 65 ans avec au moins 3 critères de fragilité (Fried) ci-contre Amaigrissement récent involontaire
Marche lente
Faible endurance
Faiblesse, asthénie
Activité physique réduite
Immunodépression
(critères HAS ci-contre)
Transplanté d’organe solide
Greffé de cellules souches hématopoïétiques
Traitement par immunosuppresseur ou par biothérapie
Traitement par chimiothérapie anti-cancéreuse
dans les 6 mois précédents
Déficit immunitaire héréditaire
VIH avec un nombre de CD4 < 200 /mm3
Insuffisance rénale chronique sévère Débit de filtration glomérulaire < 30 ml/min/1,73 m²
Femme enceinte

N.B. : le diabète a été retiré des facteurs de risque de complication dans ces dernières recommandations de la SPILF. En effet, bien que tous les types d’IU semblent plus fréquents chez les patients diabétiques, la littérature est discordante quant à l’impact du diabète sur la gravité des IU. La plupart des recommandations d’autres pays gardent cependant fréquemment le diabète comme facteur de risque de complication ou de gravité.

B. Définition selon la gravité

[violet]1. Sévérité du sepsis[/violet]

Les critères de gravité septique des infections urinaires ne sont pas spécifiques. Ils sont identiques à ceux de toutes les infections : qSOFA > 2 (anciennement «  sepsis sévère  ») et choc septique.

Les cystites ne sont jamais graves.

[violet]2. Nécessité d’un drainage[/violet]

Une infection urinaire est aussi qualifiée de grave dans toute situation clinique où un drainage (chirurgical ou par radiologie interventionnelle) est nécessaire : rétention purulente sur lithiase, abcès, pyélonéphrite emphysémateuse…

IV. Présentations cliniques chez la femme (A)

Il existe peu de différences sur les antibiotiques utilisables dans chaque situation clinique. C’est seulement l’ordre de préférence des antibiothérapies qui dépend du caractère simple, à risque de complication ou grave de l’IU. Le niveau de preuve pour préférer un antibiotique à un autre selon la situation clinique est rarement élevé.
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A. Colonisation urinaire

Une colonisation urinaire est l’isolement d’une bactérie dans l’urine, quelle que soit sa quantité (sauf chez la femme enceinte où le seuil de significativité est fixé à 105 UFC/ml sur deux ECBU consécutifs ; voir paragraphe dédié), qu’il y ait une leucocyturie associée ou non, et en l’absence de tout signe fonctionnel urinaire, de fièvre et de syndrome inflammatoire biologique.

La colonisation urinaire n’est pas une infection urinaire. Il s’agit d’une situation de commensalisme extra-intestinal.

Seule la qualité du recueil urinaire permet donc de distinguer une colonisation urinaire d’une contamination de l’ECBU. Si l’on pense que le recueil urinaire a pu être contaminé, il semble raisonnable de refaire le prélèvement avant de considérer qu’il s’agit d’une colonisation, notamment lorsqu’il n’y a pas de leucocyturie associée.

Il n’y a lieu de traiter une colonisation urinaire qu’avant un geste invasif sur les voies urinaires et chez la femme enceinte (voir paragraphe dédié).

B. Cystiteaiguë

[violet]1. Cystite aiguë simple[/violet]

Le diagnostic est clinique et repose sur l’association :

d’un ou plusieurs signes fonctionnels urinaires parmi :

brûlures mictionnelles, gène ou douleur sus-pubienne,

pollakiurie, impériosités («  urgenturie  »),

urines troubles, parfois hématurie ;

d’une BU montrant la présence de nitrites et/ou de leucocytes ;

sans fièvre, ni douleur lombaire, ni syndrome inflammatoire.

Aucun examen complémentaire ne doit alors être réalisé. Si la BU est négative, un autre diagnostic doit être envisagé.

Le traitement antibiotique est prescrit pour améliorer les symptômes :

mais un tiers des cystites aiguës simples peuvent guérir spontanément ;

et l’évolution naturelle d’une cystite aiguë simple vers une pyélonéphrite aiguë est très rare, même en l’absence de traitement.

Les antibiotiques recommandés sont par ordre décroissant de préférence :

1re intention : fosfomycine-trométamol en dose unique ;

2e intention : pivmécillinam, 5 jours (prodrogue d’un antibiotique apparenté aux -lactamines, actif principalement sur les bacilles à Gram négatif, n’est pas utilisable dans les infections parenchymateuses) ;

ne sont pas indiqués :

l’amoxicilline, l’association amoxicilline-acide clavulanique et le cotrimoxazole ne sont pas indiqués du fait du risque élevé de résistance. Les céphalosporines de 3e génération (C3G) orales ne sont pas recommandées du fait de leur impact important sur le microbiote intestinal. Les fluoroquinolones ne sont plus recommandés en raison du fort risque de sélection associé à leur utilisation : entérobactéries sécrétrices de BLSE, pyocyanique, entérocoques. La nitrofurantoïne (5 jours, contre-indiquée si Cockcroft < 40 ml/min) n’est plus recommandée du fait de son risque de toxicité très rare mais grave.

Aucun suivi clinique ni paraclinique n’est nécessaire en cas d’évolution favorable. En cas de persistance des symptômes 3 jours après le début du traitement, un ECBU doit être réalisé.

[violet]2. La cystite aiguë à risque de complication[/violet]

Les éléments du diagnostic clinique sont les mêmes que pour une cystite simple mais elle survient chez une patiente aillant des facteurs de risque de complication. Chez les sujets âgés, la cystite peut être révélée par un épisode d’incontinence urinaire aiguë inexpliquée, des chutes, des troubles de l’appétit, une augmentation de la dépendance, un syndrome confusionnel ou d’agitation.

Une BU est recommandée, mais un ECBU doit être systématiquement réalisé afin d’obtenir un antibiogramme. D’autres examens complémentaires peuvent être discutés en fonction du facteur de risque de complication.

En cas de cystite peu symptomatique, il est recommandé de différer le traitement jusqu’à l’obtention de l’antibiogramme de façon à limiter l’apparition de résistances bactériennes chez ces patientes qui reçoivent souvent des traitements antibiotiques répétés. En fonction des résultats, les molécules à privilégier sont :

amoxicilline 7 jours ;

pivmécillinam 7 jours ;

nitrofurantoïne 7 jours ;

fosfomycine trométamol (3 doses espacées chacune de 48 h) ;

triméthoprime 5 jours.

Lorsque la clinique nécessite un traitement immédiat, le traitement probabiliste reposera sur la nitrofurantoïne ou la fosfomycine (selon les mêmes modalités).
Céfixime et fluoroquinolone ne sont plus recommandés du fait de leur impact sur le microbiote intestinal.

Aucun suivi clinique ni paraclinique n’est nécessaire en cas d’évolution favorable. En cas de persistance des symptômes 3 jours après le début du traitement, un ECBU devra être réalisé.

[violet]3. Cystites aiguës récidivantes[/violet]

Des cystites aiguës sont qualifiées de récidivantes lorsque 4 épisodes ou plus surviennent en moins de 12 mois.

Un ECBU est recommandé lors des premiers épisodes (donc à partir du 4e épisode s’il s’agit de cystites récidivantes sans facteur de risque de complication puisque l’on ne fait pas d’ECBU mais seulement une BU habituellement pour ces cystites) pour connaître l’épidémiologie.

Examens complémentaires (B)

Chez la femme non ménopausée sans facteur de risque de complication : examen clinique uniquement : urologique (vérifier l’absence de troubles mictionnels par le biais d’un calendrier mictionnel) et gynécologique.

Dans les autres cas : les étiologies sont possibles sont très variées : mauvaise trophicité de la muqueuse vaginale, vessie neurologique, prolapsus pelviens, diurèse insuffisante. Il est donc nécessaire de discuter selon le cas avec des spécialistes (néphrologues, urologues, gynécologues, gériatres). Le bilan minimum comporte une échographie des voies urinaires et pelvienne avec mesure du résidu post-mictionnel. On peut y ajouter au cas par cas : débitmétrie urinaire, bilan urodynamique, uroscanner, cystoscopie, cystographie.

Traitement

Cystites sans FDR de complication récidivantes : chaque épisode est traité comme une cystite simple, éventuellement en auto-traitement, après avoir réalisé une bandelette urinaire, et après avoir réalisé quelques ECBU de façon à connaître les antibiotiques efficaces sur toutes les bactéries isolées. La nitrofurantoïne ne peut être utilisée dans cette indication.

Cystites avec FDR de complication récidivantes : pas de recommandation générale. Le traitement doit être décidé après une concertation pluridisciplinaire.

Les mesures préventives non médicamenteuses sont résumées dans le tableau 6.

Enfin, si les cystites sont très fréquentes (au moins une fois par mois), on peut discuter une antibioprophylaxie continue à base de fosfomycine-trométamol (une prise par semaine), de trimétoprime ou de cotrimoxazole (une prise quotidienne). Cependant ces deux dernières molécules ont été étudiées dans les années 80, lorsque l’antibiorésistance était bien inférieure à celle d’aujourd’hui. La durée est de 6 mois puis une interruption doit être essayée.

Lorsque les cystites sont liées aux rapports sexuels (cystites post-coïtales), on peut proposer une antibiothérapie systématique avec les mêmes molécules, à prendre dans les 2 h précédant ou suivant le rapport sexuel, sans dépasser la posologie de l’antibioprophylaxie continue.

Il n’y a pas lieu de faire d’ECBU systématique lors de la surveillance. L’objectif de la prise en charge globale est la réduction des épisodes symptomatiques et non la stérilité permanente des urines.

Tableau 6. Règles hygiéno-diététiques visant à réduire l’incidence des cystites aiguës récidivantes

Diurèse abondante
Mictions fréquentes, non retenues en cas d’envie et en position assise
Régularisation du transit intestinal
Une toilette intime par jour au maximum avec un savon doux, pH neutre
Miction après chaque rapport sexuel en cas de cystites post-coïtales
Arrêt des spermicides éventuels
Canneberge (efficacité encore incertaine et non remboursé)
Œstrogènes locaux si ménopause et trophicité vaginale insuffisante

C. Pyélonéphrite aiguë chez la femme (A)

Les pyélonéphrites aiguës sont distinguées selon qu’elles sont simples ou à risque de complication et selon leur gravité. Les facteurs de risque de complication sont ceux évoqués dans le tableau 5 et les complications sont celles décrites au paragraphe B. Ils doivent être systématiquement recherchés.

Devant une PNA, on évalue les critères suivants dans cet ordre :

1. Sexe → IU Masculines si homme ;
2. Grossesse →PNA gravidique si femme enceinte ;
3. Gravité → PNA grave si qSOFA > 2 (voir § 5) ;
4. Facteur de risque de complication→PNA avec FDR de complication si présents (voir § 4), PNA simple sinon (voir § 3).

[violet]1. Pyélonéphrite aiguë (PNA) simple sans critère de gravité[/violet]

Le tableau clinique de la PNA simple associe :

un début brutal ;

une fièvre élevée (supérieure à 38,5 °C) avec frissons ;

une douleur lombaire le plus souvent unilatérale localisée, avec parfois irradiation vers les organes génitaux externes évoquant alors une colite néphrétique, exacerbée par palpation de la fosse lombaire ;

des signes inconstants de cystite ;

il ne s’agit presque jamais d’une cystite qui aurait été laissée sans traitement depuis plusieurs jours. Cystite et pyélonéphrite sont deux maladies urinaires différentes.

Les signes de localisation (douleur lombaire) et les signes urinaires peuvent manquer en particulier chez les sujets diabétiques et les personnes âgées. Il peut donc s’agir d’une fièvre isolée.

Les diagnostics différentiels à envisager sont les causes de douleur lombaire fébrile : angiocholite, cholécystite, sigmoïdite, pneumopathie d’une base pulmonaire, infarctus rénal ou de la rate.

[violet]2. Examens complémentaires[/violet]

[violet]a. Examens biologiques[/violet]

La réalisation d’une BU est souhaitable. Si elle est négative, il est recommandé de rechercher un autre diagnostic.

L’ECBU est le seul examen biologique nécessaire. Il doit être réalisé avant tout traitement antibiotique.
La présence d’une bactériémie ne modifie pas le pronostic ni la prise en charge des pyélonéphrites aiguës simples sans gravité. Le prélèvement systématique d’hémocultures n’est donc pas nécessaire devant un tableau clinique typique, mais seulement en cas de doute diagnostique.

De même, en cas de PNA simple, les autres examens biologiques tels que la NFS (hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles), la CRP (élevée) et la créatininémie (normale en cas de PNA unilatérale simple) ne modifient pas la prise en charge et ne doivent donc pas être effectués de façon systématique.

[violet]b. Examens d’imagerie[/violet]

L’échographie rénale et des voies excrétrices n’est indiquée qu’en cas de PNA hyper-algique. Elle est alors réalisée dans les 24 h pour rechercher une complication : lithiase, dilatation des voies urinaires en amont d’un obstacle, suppuration intra- ou péri-rénale. Elle est peu sensible pour détecter un foyer de pyélonéphrite.

En cas d’évolution défavorable (fièvre après 72 h d’antibiothérapie efficace), il est recommandé d’effectuer une échographie rénale (en cas de suspicion de lithiase) ou un uroscanner (en cas de suspicion d’abcès rénal).

Aucun autre examen de radiologie n’est nécessaire en cas de PNA simple :

l’urographie intraveineuse (UIV) n’a plus d’indication en cas d’infection urinaire,

l’urétro-cystographie rétrograde peut être envisagée chez le petit garçon ou après plus de 2 épisodes de pyélonéphrite aiguë, à la recherche d’un reflux vésico-urétéral. Elle sera réalisée après vérification de la stérilisation des urines.

[violet]3. Traitement de la pyélonéphrite aiguë simple[/violet]

Le traitement de la PNA simple est ambulatoire. Cependant, une hospitalisation doit être envisagée dans les circonstances suivantes :

forme hyperalgique ;

doute diagnostique ;

vomissements rendant impossible un traitement par voie orale ;

conditions socio-économiques défavorables ;

doutes concernant l’observance du traitement.

Avant les résultats de l’antibiogramme, on recommande :

la prescription d’un fluoroquinolone per os : ciprofloxacine ou lévofloxacine, sauf en cas d’utilisation dans les 6 mois précédents. Dans ce cas, on prescrira une C3G par voie intraveineuse (céftriaxone ou cefotaxime) ;

en cas d’allergie sévère documentée à la pénicilline, on peut proposer l’aztreonam ou un aminoside.

Après obtention de l’antibiogramme à 48 h et après évolution favorable, il est recommandé de modifier l’antibiothérapie pour en restreindre le spectre. Les molécules qui peuvent être utilisées en relais sont l’amoxicilline, l’association amoxicilline et acide clavulanique, le céfixime, les fluoroquinolones et le cotrimoxazole.

La durée du traitement est de 7 jours si l’on n’utilise que les C3G injectables ou les fluoroquinolones et de 10 jours si on utilise une autre molécule en relais.

Évolution :
favorable : le suivi est uniquement clinique, l’ECBU de contrôle est inutile sous et après

traitement ;

défavorable (fièvre après 72 heures d’antibiothérapie efficace) : ECBU de contrôle avec antibiogramme sous traitement et uroscanner (ou échographie en cas de contre-indication).

[violet]4. La PNA à risque de complication, sans signe de gravité (B)[/violet]

Les signes cliniques sont ceux de la PNA mais s’y associent des facteurs de risque de complication (cf. tableau 5).

Il est alors recommandé de doser la CRP et la créatininémie, de prélever une NFS ainsi que d’effectuer un uroscanner dans les 24 h. En cas de contre-indication (insuffisance rénale chronique), une échographie doit être réalisée.

Les critères d’hospitalisations et les traitements sont les mêmes que dans la PNA simple.

Les principes de la prise en charge sont ceux des PNA simples avec les nuances suivantes :

les C3G injectables sont à préférer aux fluoroquinolone per os avant la réception de l’antibiogramme du fait d’une résistance plus fréquente aux fluoroquinolones en cas de FDR de complication ;

la durée du traitement est de 10 jours si l’évolution est immédiatement favorable et de 14 jours sinon.

[violet]5. La PNA grave (avec ou sans risque de complication) (B)[/violet]

Les examens complémentaires doivent comporter : NFS, CRP, urée, créatininémie, hémocultures, uroscanner en urgence (ou au plus tard dans les 24 h), ou échographie rénale en cas de contre-indication.

L’hospitalisation est systématique.

Le traitement antibiotique empirique initial repose sur :

l’association C3G et amikacine par voie intraveineuse ;

en cas de sepsis sévère ou de PNA nécessitant un drainage chez une patiente ayant présenté une IU à entérobactérie sécrétant une BLSE dans les 6 mois précédents : utiliser la bétalactamine au spectre le plus étroit active sur l’entérobactérie connue + amikacine ;

en cas de choc septique et d’un facteur de risque d’infection à entérobactérie sécrétant une BLSE : association carbapénème et amikacine.

En relais, les mêmes molécules que pour le traitement des PNA sans gravité peuvent être utilisées après évolution favorable.

La durée du traitement est de 10 à 14 j mais peut être prolongée en fonction de la situation clinique, en particulier lorsque la gravité repose sur la présence d’une collection suppurée qui nécessite un drainage.

Le suivi est clinique. L’ECBU de contrôle pendant ou après le traitement n’est pas systématique mais seulement en cas d’évolution défavorable ou situation particulière (lithiase).

Le tableau 7 résume le traitement des PNA.

Tableau 7. Résumé de la prise en charge des PNA

Diagnostic Traitement initial empirique Relais Durée
PNA simple Fluoroquinolone per os ou C3G injectable Amoxicilline
Amoxicilline – acide clavulanique
Fluoroquinolone
Céfixime
Cotrimoxazole
7 j si C3G ou FQ 10 j si autre ATB de relais
PNA à risque de complication C3G injectable (ou fluoroquinolone per os) 0-14 j
PNA grave sans FDR d’EBLSE C3G injectable + amikacine 10-14 j (+ si collection)
PNA grave (qSOFA > 2 ou drainage) et antécédent d’IU à EBLSE dans les 6 mois précédents ß-lactamtine active sur l’EBLSE connue + amikacine
Choc septique et risque d’EBLSE quel qu’il soit Carbapénème + amikacine 10-14 j (+ si collection)


EBLSE : Entérobactérie productrice de BLSE

V. Infections urinaires masculines (A)

A. Présentation clinique

En cas d’infection urinaire chez l’homme, aucun examen clinique (palpation des fosses lombaires, examen scrotal, toucher rectal), ni d’imagerie (échographie, IRM) ne permet d’exclure avec certitude une atteinte bactérienne de la prostate. Les différents tableaux cliniques d’infection urinaire chez l’homme (prostatite, orchiépididymite et pyélonéphrite aiguës) ont donc été regroupés sous le terme générique d’infection urinaire masculine et doivent tous être pris en charge de la même façon.

Par définition, les IU masculines ne peuvent pas être simples, puisque le sexe masculin est un facteur de risque de complication. Elles peuvent donc être sans gravité, ou grave.

Les signes cliniques sont extrêmement variés, allant des simples signes fonctionnels urinaires, au choc septique, en incluant une fièvre isolée. Les signes peuvent associer :

signes fonctionnels urinaires (comme pour les cystites) ;

fièvre, frissons ;

rétention aiguë d’urine (la survenue d’une rétention aiguë d’urine en contexte fébrile doit faire évoquer le diagnostic d’infection urinaire masculine en première intention) ;

parfois, des signes de localisation qui ne changent pas la prise en charge et qui n’éliminent pas une atteinte possible associée de la prostate : douleur à l’é­bran­lement d’une fosse lombaire évoquant une PNA (la PNA est rare chez l’homme en l’absence d’anomalie du tractus urinaire. Par ailleurs, un tiers des prostatites aiguës sont accompagnées d’une douleur lombaire, même en l’absence de PNA associée), bourse chaude rouge et douloureuse évoquant le diagnostic d’orchiépididymite.

L’interrogatoire recherchera des antécédents de maladie vésico-prostatique préexistante  : pollakiurie, miction impérieuse, diminution de la force du jet, nycturie, dysurie, ou anomalie au toucher rectal.

B. Examens complémentaires

La BU est conseillée lors de la présentation du patient, elle est très évocatrice du diagnostic si elle est positive. Dans tous les cas, un ECBU doit être réalisé avant de débuter le traitement (une BU négative n’élimine pas le diagnostic).

Les hémocultures ne sont à prélever qu’en cas de fièvre associée.

Le dosage du PSA n’est pas recommandé.

Une échographie de l’appareil urinaire par voie sus-pubienne doit être réalisée dans les 24 h lorsque l’on suspecte une obstruction (lithiase, douleur lombaire, rétention aiguë d’urine) ou de sepsis grave. À la phase aiguë, l’échographie endo-rectale est douloureuse et n’est pas recommandée.

En cas d’évolution défavorable après 72 h de traitement :

échographie par voie endo-rectale pour l’exploration de la prostate ;

uroscanner pour l’exploration des reins et des uretères.


C. Traitement des infections urinaires masculines

Les indications de l’hospitalisation sont les mêmes qu’en cas de PNA (voir paragraphe IV. C. 3.).

Le traitement antibiotique empirique avant les résultats de l’ECBU :

n’est pas systématique : en cas d’IU pauci symptomatique, il peut être différé jusqu’au résultat de l’antibiogramme ;

pour les IU masculines symptomatiques sans signe de gravité : identique aux PNA à risque de complication : C3G injectable ou fluoroquinolone ;

pour les IU masculines graves : identique aux PNA graves : C3G injectable (ou carbapénème) + aminoside.

Après réception de l’antibiogramme à 48 h, les deux molécules à privilégier sont :

1re intention : Fluoroquinolone  : contrairement à la prescription chez la femme où les fluoroquinolones doivent être évités du fait du risque de résistance des bactéries urinaires à cette classe antibiotique, elles constituent le traitement de 1er choix en cas d’IU masculine à bactérie sensible en raison de leur excellente diffusion prostatique ;

2e intention : Cotrimoxazole.

Selon l’antibiogramme les C3G injectables constituent une alternative en cas de bactérie résistante au fluoroquinolone et au bactrim.

Les molécules suivantes ne doivent pas être utilisées même en cas d’IU masculine avec une bactérie sensible du fait de leur diffusion prostatique insuffisante : céfixime, association amoxicilline-ac. clavulanique, nitrofurantoïne, fosfomycine-trométamol, pivmécillinam (traitement des cystites uniquement, pour ces trois dernières molécules).

La durée de l’antibiothérapie est de 14 jours en cas d’IU masculine aiguë traitée par fluoroquinolone, cotrimoxazole ou C3G injectable. Le traitement peut être prolongé à 21 jours si une autre molécule est utilisée ou si une uropathie sous-jacente n’est pas corrigée, voire plus en cas de drainage nécessaire.

En cas de rétention aiguë d’urine, le drainage urinaire peut être assuré par cathétérisme sus-pubien, mais aussi par sondage vésical (ce n’est plus une contre-indication).

Bilan au décours

Après un 1er épisode d’IU masculine, le suivi est clinique essentiellement. Aucun examen complémentaire n’est nécessaire en cas d’évolution favorable et en l’absence d’antécédent de maladie vésico-prostatique préexistante (pollakiurie, miction impérieuse, diminution de la force du jet, nycturie, dysurie, ou anomalie au toucher rectal).

Après un 2e épisode, la recherche d’anomalie vésico-prostatique sera complétée par une échographie des voies urinaires avec quantification du résidu post-mictionnel, une débimétrie urinaire et une consultation d’urologie.

VI. IU gravidiques (A)

Les IU sont fréquentes au cours de la grossesse. Elles peuvent avoir des conséquences graves pour la mère et le fœtus. C’est pourquoi le dépistage d’une colonisation urinaire est recommandé chez toutes les femmes enceintes une fois par mois à partir du 4e mois.

A. Colonisation urinaire gravidique

Elle est définie par l’isolement d’une seule bactérie en quantité ≥ 105 UFC/ml en l’absence totale de symptôme urinaire.

Elle est recherchée par BU (femmes sans antécédent particulier) ou par ECBU (femmes aux antécédents d’IU, d’uropathie ou de diabète) tous les mois à partir du 4e mois. Lorsque la BU est positive, un ECBU doit systématiquement être réalisé.

Le traitement systématique des colonisations urinaires gravidiques est justifié par le fait qu’il diminue l’incidence des PNA gravidiques. Les molécules utilisables pour le traitement sont identiques à celles préconisées pour le traitement des cystites aiguës à risque de complication après le résultat de l’ECBU, en privilégiant la fosfomycine-trométamol en prise unique.

Un ECBU sera réalisé une semaine après la fin du traitement, puis tous les mois jusqu’à l’accouchement.

B. Cystite gravidique

Le traitement empirique doit être débuté après réalisation d’un ECBU sans en attendre le résultat. Les antibiotiques conseillés sont les mêmes que ceux utilisés pour traiter les cystites aiguës sans facteur de risque de complication : 1re intention : fosfomycine-trométamol en prise unique, 2e intention : pivmécillinam. L’ECBU sert à vérifier que ces antibiotiques sont actifs et à guider le traitement en cas d’évolution défavorable ou de complication.

Il est conseillé de réaliser un ECBU une semaine après la fin du traitement antibiotique puis une fois par mois jusqu’à l’accouchement.


C. PNA gravidique

Elle est fréquente et présente quelques spécificités :

plus souvent droite que gauche (pression de l’utérus sur l’uretère droit) ;

seule imagerie autorisée : échographie ;

comporte un risque maternel (septicémie, sepsis grave) et fœtal (prématurité).

Examens biologiques : l’ECBU est systématique, les hémocultures sont indispensables en cas de PNA grave.

Une échographie sera effectuée en urgence (dans les 24 h) en cas de PNA hyperalgique ou de doute sur un obstacle urétéral. L’échographie doit être interprétée en tenant compte de la dilatation habituelle des cavités pyélocalicielles au cours de la grossesse (pression de l’utérus sur les uretères, effets myorelaxants de la progestérone diminuant le péristaltisme urétéral).

Un examen obstétrical est systématique, quel que soit le terme de la grossesse.

Le traitement doit être débuté dès les prélèvements faits, sans attendre les résultats de l’ECBU. Il suit les principes du traitement des PNA à risque de complication (grave ou non), en privilégiant une hospitalisation dans la majorité des cas. Celle-ci sera courte (48-72 h) en l’absence de gravité et d’élément pouvant interférer avec l’efficacité du traitement (vomissement, inobservance, risque de complication, gravité, examen obstétrical normal…).

Un ECBU est conseillé une semaine après la fin du traitement, puis tous les mois jusqu’à l’accouchement.

VII. IU de l’enfant

A. Épidémiologie (B)

Les bactéries rencontrées et le mode de contamination sont identiques chez l’enfant et l’adulte. E. coli est responsable de 70 à 90 % des IU de l’enfant, suivi de Proteus mirabilis, les Klebsielles et les entérocoques.

L’émergence d’IU communautaires dues à des bactéries produisant une BLSE nécessite une réévaluation permanente de ces recommandations.

B. Prélèvement d’urine chez l’enfant (A)

Difficultés du recueil urinaire chez l’enfant avant l’acquisition de la propreté :

Bandelette urinaire :

valeur prédictive négative > 90 % dès l’âge d’un mois lorsqu’elle ne montre ni leucocytes ni nitrites ;

bonne valeur prédictive positive en cas de présence de leucocytes ET de nitrites. La valeur prédictive positive en cas de leucocyturie isolée est insuffisante.

Possible faux positif après recueil urinaire par poche stérile du fait de la contamination par les bactéries commensales périnéales, même lorsque les conditions de recueil urinaire optimales ont été respectées (bonne désinfection périnéale avant pose de la poche, faible durée du recueil, acheminement rapide au laboratoire). Ce type de recueil reste tout de même intéressant lorsque la probabilité d’IU est élevée, c’est-à-dire quand la BU montre leucocytes et nitrites en grande quantité.

En conséquence en dehors des situations d’urgence ou graves (sepsis sévère, neutropénie…), il est recommandé, dès l’âge d’un mois :

d’effectuer une BU avant d’envisager un ECBU ;

en cas de BU positive pour les leucocytes et/ou les nitrites, d’effectuer un ECBU en privilégiant le prélèvement au jet, le cathétérisme urétral ou la ponction sus-pubienne (le recueil par poche reste envisageable si la BU montre une leucocyturie et des nitrites en grande quantité) ;

de prélever en plus une hémoculture dans les formes graves ou les sujets à risque (uropathie, âge < 3 mois…).

C. Particularités cliniques

[violet]1. La cystite[/violet]

Chez le nourrisson :

pauvreté des signes fonctionnels ;

diagnostic souvent au stade de PNA.

Chez l’enfant plus grand : après l’acquisition de la propreté :

signes urinaires identiques à ceux de l’adulte ;

énurésie avec pollakiurie diurne parfois révélatrice.

Traitement : amoxicilline et acide clavulanique, ou cotrimoxazole, ou céfixime dès l’ECBU prélevé. Adaptation secondaire à l’antibiogramme si besoin.

La durée totale du traitement est de 5 jours.

Ces options thérapeutiques sont reprises dans le tableau 8.

[violet]2. Infections urinaires fébriles[/violet]

Ce terme est actuellement préféré à celui de PNA, car en cas de fièvre avec des urines infectées, une atteinte du parenchyme rénal n’a pas toujours pu être démontrée.

Présentation clinique :

chez l’enfant de moins de 3 mois, le tableau peut être celui d’une septicémie qui peut mettre en jeu le pronostic vital ;

chez l’enfant plus grand, fièvre, douleurs lombaires et signes urinaires ;
à tous les âges, le tableau peut être atypique : fièvre prolongée isolée, vagues douleurs abdominales, asthénie ;

chez le nourrisson, il faut rechercher des anomalies de la région périnéale (hypo ou épispadias, malposition anale…).

Les possibilités thérapeutiques sont limitées chez l’enfant : quinolones, fosfomycine, nitrofuradoïne et pivmécilinam sont contre-indiquées, n’ont pas d’AMM, ou encore ne sont pas commercialisées avec une galénique pédiatrique (tableau 8).

En cas de situation grave : âge < 3 mois, sepsis sévère, uropathie sous-jacente :

hospitalisation ;

C3G injectable + amikacine.

En l’absence de gravité :

traitement ambulatoire ;

C3G injectable (par voie IV ou IM) ou aminoside IV seul, voire C3G orale dans les situations les moins sévères.

Dans tous les cas, après réception de l’antibiogramme, on envisage un relais par :

amoxicilline (sauf pour E. coli qui présente des concentrations minimales

inhibitrices à l’amoxicilline élevées même lorsqu’il est sensible) ;

cotrimoxazole chez l’enfant de plus de 1 an ;

céfixime ;

(ciprofloxacine : contre-indiquée chez l’enfant avant la fin de la croissance du fait d’un risque d’atteinte articulaire grave).

La durée totale du traitement est de 10 jours (sauf en cas de traitement par ciprofloxacine où le traitement peut être diminué à 7 jours).

Le reflux vésico-urétéral est fréquent surtout en cas d’IU récidivantes. Cependant, il s’agit le plus souvent de reflux de bas grade, guérissant spontanément avec l’âge et pour lesquels aucun traitement ne doit être envisagé. En cas d’UTI récidivantes, une échographie rénale (recherche d’hypoplasie ou de dysplasie rénales) et une cystographie rétrograde seront envisagées au cas par cas.

Tableau 8. Résumé du traitement des IU de l’enfant

Situation clinique Antibiothérapie initiale Relais Durée
Cystite aiguë Amoxicilline- acide clavulanique Cotrimoxazole
Céfixime
5 jours
IU fébrile non grave C3G IV ou IM
Aminoside seul IV
Céfixime (forme peu sévère)
Amoxilline (sauf E. coli)
Cotrimoxazole
Cefixime Ciprofloxacine (après croissance)
10 j (sauf FQ, 7 j)
IU fébrile grave C3G IV + aminoside

VIII. Infections urinaires chez les patients porteurs d’une sonde vésicale (A)

A. Critères diagnostiques

Le diagnostic d’IU sur sonde est surtout un diagnostic d’élimination. Les signes locaux (impériosité, pollakiurie, brûlures mictionnelles) sont non spécifiques : souvent absents du fait de l’écoulement continu des urines, ou au contraire présents sans infection en particulier peu après sa mise en place.

On évoque une IU sur sonde vésicale devant les signes cliniques suivants, lorsque les autres causes ont été éliminées :

fièvre ou hypothermie ;

hypotension ;

malaise général, léthargie, altération de l’état mental.

La BU est inutile. Un ECBU sera directement prélevé sur l’opercule de prélèvement de la sonde urinaire, sans la changer.

Une IU sur sonde est évoquée en cas d’association des signes cliniques précédents à une bactériurie ≥ 105 UFC/ml, quelle que soit la leucocyturie (tableau 2). La leucocyturie est très fréquente en cas de sondage vésical et n’a donc pas de valeur dans le diagnostic.

B. Traitement

[violet]1. Indications[/violet]

Il n’y a pas lieu de dépister systématiquement ni de traiter une colonisation urinaire sur sonde (absence totale de symptôme) sauf avant une intervention chirurgicale au contact de l’urine.

En particulier, il n’y a pas lieu de rechercher ni de traiter une colonisation urinaire avant l’ablation d’une sonde vésicale.

[violet]2. Modalités du traitement[/violet]

Le traitement doit être débuté dès les prélèvements en cas de fièvre et en urgence en cas de sepsis sévère.

Avant les résultats de l’ECBU :

pipéracilline – tazobactam ou C3G injectable + aminoside (amikacine) si sepsis sévère ;

en cas d’allergie : aminoside seul chez la femme et fluoroquinolone ou cotrimoxazole chez l’homme.

Il est recommandé de retirer ou de changer la sonde vésicale 24 h après le début du traitement.

Après les résultats de l’antibiogramme à 48 h, voir les modalités du traitement de relais des PNA pour les femmes et celles des infections urinaires masculines pour les hommes.

En cas de colonisation urinaire sur sonde vésicale avant une chirurgie au contact de l’urine il faut :

débuter une antibiothérapie selon les données de l’antibiogramme ;

changer la sonde vésicale après 24 h de traitement adapté ;

traiter au moins 48 h avant de débuter la chirurgie ;

traiter jusqu’à l’ablation de la sonde vésicale, ou pour 7 jours lorsque cette sonde ne peut être retirée après chirurgie.

IX. Quelques spécificités chez les sujets âgés

Présentation souvent atypique rendant le diagnostic difficile : fièvre absente dans 30 % des cas, douleurs abdominales plutôt que lombaires dans 20 % des cas, altération de l’état général, confusion.

Septicémie plus fréquente.

Complications des sondages vésicaux à demeure.