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Manuel de Néphrologie 10° édition
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Chapitre 13 Élévation de la créatininémie Item 258

N° 258. Élévation de la créatininémie

Chapitre 13 Élévation de la créatininémie Item 258


Pour une meilleure compréhension de l’item, les rubriques concernant les examens complémentaires ont été regroupées par type d’insuffisance rénale, aiguë ou chronique.

Rang Rubrique Intitulé Descriptif
A Diagnostic positif Connaître l’interprétation d’un dosage de créatininémie
A Diagnostic positif Connaître les formules d’estimation du débit de filtration glomérulaire Savoir utiliser les formules CKD-EPI (et MDRD) chez l’adulte et connaître la formule de Schwartz chez l’enfant,
B Diagnostic positif Connaître la formule d’estimation d’une clairance rénale de la créatinine Cockcroft-Gault chez l’adulte
A Prise en charge Citer les circonstances au cours desquelles il convient de doser la créatininémie
A Diagnostic positif Connaître les arguments en faveur d’une Insuffisance rénale chronique Devant une élévation de la créatinine. Citer les arguments en faveur d’une insuffisance rénale chronique
A Diagnostic positif Connaître les arguments en faveur d’une Insuffisance rénale aiguë Devant une élévation de la créatinine. Citer les arguments en faveur d’une insuffisance rénale aiguë
A Étiologies Connaître les arguments en faveur de la nature obstructive d’une élévation de la créatininémie Connaître les éléments cliniques (interrogatoire et examen physique) en faveur de la nature obstructive d’une élévation de la créatininémie
B Examens complémentaires Connaître les examens complémentaires à réaliser devant une élévation de la créatininémie présumée d’origine obstructive Connaître les éléments paracliniques en faveur de la nature obstructive d’une élévation de la créatininémie
A Étiologies Connaître les arguments en faveur de la nature de nature fonctionnelle d’une élévation de la créatininémie Connaître les éléments cliniques (interrogatoire et examen physique) en faveur de la nature fonctionnelle d’une élévation de la créatininémie
B Examens complémentaires Connaître les examens complémentaires à réaliser devant élévation de la créatininémie présumée d’origine fonctionnelle Connaître les éléments paracliniques en faveur de la nature fonctionnelle d’une élévation de la créatininémie
A Étiologies Connaître les arguments en faveur de la nature parenchymateuse d’une élévation de la créatininémie Connaître les éléments cliniques (interrogatoire et examen physique) en faveur de la nature parenchymateuse d’une élévation de la créatininémie
B Examens complémentaires Connaître les examens complémentaires à réaliser devant une élévation de la créatininémie présumée d’origine parenchymateuse Connaître les éléments paracliniques en faveur de la nature parenchymateuse d’une élévation de la créatininémie

I. Savoir reconnaître une élévation significative d’un dosage isolé de la créatininémie (A)

La valeur de créatinine dans le plasma est inversement liée au Débit de Filtration Glomérulaire (DFG), donc à la fonction rénale. Ainsi, plus la fonction rénale est altérée, plus la créatininémie augmente.

La valeur de créatinine dans le plasma dépend aussi de la production musculaire de créatinine. Pour un individu donné, il est donc difficile de déterminer le caractère normal ou anormal d’une valeur de créatininémie.

La créatininémie en tant que telle est donc un marqueur imparfait de la fonction rénale. Les valeurs considérées comme «  normales  » sont habituellement situées :

entre 50 et 90 µmol/L chez la femme ;

entre 80 et 115 µmol/L chez l’homme.

Par exemple, un sujet avec une masse musculaire importante peut avoir une valeur de créatininémie élevée sans avoir d’insuffisance rénale. Inversement, une personne âgée dénutrie ou une personne avec anorexie mentale peut avoir une créatininémie normale avec une réelle insuffisance rénale.

II Formules d’estimation du Débit de Filtration Glomérulaire (DFGe) (A)

Pour faire de la créatininémie un marqueur spécifique de la fonction rénale, indépendant de la masse musculaire, on utilise la créatininémie dans des formules mathématiques qui estiment la valeur du Débit de Filtration Glomérulaire (DFG). Ces formules incluent, outre la créatininémie, certains paramètres anthropométriques (âge, sexe, poids, ethnie).

A. Chez l’adulte, deux formules estiment directement le DFG
(et non la clairance de la créatinine)

La formule MDRD (Modification of Diet in Renal Disease Study) simplifiée (2006) :
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MDRD (DFG estimé en mL/min/1,73 m2) = 175 × [Créatininémie (µmol/L) × 0,885]–1,154 × Âge – 0,203 × (0,742 si femme) × 1,21 si afro-américain

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La formule CKD-EPI (2009) :
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CKD-EPI (DFG estimé en mL/min/1,73 m2) = 141 × min (Créatininémie × 0,885/k, 1) a × max (Créatininémie × 0,885/ k, 1) – 1,209 × 0,993Âge × 1,018 si femme × 1,159 si afro-américain

 k0,7 pour les femmes et 0,9 pour les hommes,

 α -0,329 pour les femmes et -0,411 pour les hommes,

 min indique la valeur minimale de Créatininémie × 0,885/ ou 1, max indique la valeur minimale de Créatininémie × 0,885/ ou 1

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Les formules MDRD et CKD-EPI estiment directement le DFG indexé sur la surface corporelle (résultat en ml/min/1,73 m2). Elles incluent le sexe, l’âge, la créatininémie et l’ethnie, mais pas le poids.

Compte tenu de leur complexité d’écriture (ne pas apprendre par cœur la formule !!), elles nécessitent l’utilisation de calculateurs (disponibles facilement par voie électronique : site de la société SFNDT : http://www.sfndt.org/sn/eservice/calcul/eDFG.htm).

Les performances de ces formules sont nettement supérieures à celles de la formule de Cockcroft (cf. ci-dessous). La formule CKD-EPI est supérieure à la formule MDRD pour les valeurs basses de créatininémie (hyperfiltration, dénutrition). La Haute Autorité de Santé (2012) recommande d’utiliser la formule CKD-EPI à partir d’une créatininémie dosée par méthode enzymatique, à défaut la formule MDRD si la créatininémie est dosée par méthode colorimétrique (méthode dite de Jaffé).

Ces formules d’estimation restent des estimateurs du DFG, et donc peuvent être mises en défaut.

De façon générale, on retiendra qu’elles ne peuvent être utilisées :

chez l’enfant (utiliser la formule de Schwartz, spécifique de l’enfant) ;

en cas de dénutrition majeure ;

en cas de variation aiguë de la fonction rénale (car il n’y a pas d’état d’équilibre entre l’élimination rénale et la production musculaire de créatinine) ;

en cas de cirrhose hépatique décompensée ;

en cas de gabarit hors norme ;

en cas d’amyotrophie importante (amputation, myopathie, para ou tétraplégie) ;

en cas de grossesse ;

en cas de syndrome œdémateux marqué (par exemple : insuffisance cardiaque congestive avec œdèmes).

Dans ces situations, l’évaluation de la fonction rénale passe par d’autres méthodes (encadré B) :
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 Clairance urinaire de la créatinine sur les urines des 24 heures : elle ne dépend pas de la masse musculaire. La valeur obtenue est proche du DFG, avec une discrète surestimation car la créatinine est également sécrétée par le tubule, en plus d’être filtrée. Elle n’est donc plus recommandée (à l’exception de la grossesse et de l’IRA) ce d’autant que sa fiabilité repose aussi sur la précision du recueil des urines de 24 heures souvent pris en défaut.

 Mesure du DFG par calcul de la clairance de substances exogènes filtrées par le rein. Ce sont les plus précises (méthodes de référence ou gold-standard), mais elles sont longues et coûteuses (structures spécialisées hospitalières). Elles sont indispensables lorsqu’il est nécessaire de connaître la valeur exacte du DFG (avant néphrectomie pour don de rein) ou lorsque les formules d’estimation sont trop imprécises pour la prise de décision clinique au cas par cas.

 Plusieurs traceurs peuvent être utilisés :

— Inuline : cette méthode était le «  gold standard  » de la mesure du DFG, mais, depuis 2018, elle ne peut plus être réalisée, après la survenue de cas d’hypersensiblité (ANSM) ;

— EDTA marqué au Chrome-51  : de réalisation plus facile car ne nécessite que des injections en bolus du traceur radioactif ;

— Iothalamate radioactif marqué à l’iode-125 ;

— Iohexol (produit de contraste iodé).
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Signification du DFG au cours de l’insuffisance rénale chronique (cf. chapitre 15) :

 le DFG est normal entre 90 et 120 ml/min/1,73 m2 ;

 entre 60 à 89 ml/min/1,73 m2, l’insuffisance rénale chronique est légère. En l’absence de marqueur d’atteinte rénale persistant plus de 3 mois (protéinurie et/ou hématurie, leucocyturie, anomalies morphologiques de l’appareil urinaire), elle est considérée comme non pathologique (absence de maladie rénale chronique) ;

 un DFG inférieur à 60 ml/min/1,73 m2 suffit à définir une maladie rénale chronique (cf. chapitre 15), que des marqueurs d’atteinte rénale soient ou non présents.


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B Chez l’enfant (< 18 ans) le DFG est estimé par la formule
de Schwartz

[DFG estimé en mL/min/1,73 m2 = taille (cm) × 36,5/ créatininémie (µmol/l)].

Les valeurs de créatininémie normales sont plus basses chez l’enfant que chez l’adulte (nourrisson≈ 30 µmol/L).

III. La formule de Cockcroft et Gault (B)

C’est une estimation de la clairance de créatinine (établie 1976) qui est elle-même une estimation du DFG. Elle inclut l’âge, le sexe, le poids et la créatininémie. Le résultat obtenu est en ml/min (non indexé à la surface corporelle). Elle s’écrit :

Formule de Cockcroft et Gault :

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Ccr = (140 – âge (années)) × poids (kg) × k

Créatininémie (µmol/L)

 k = 1,23 chez l’homme

 k = 1,04 chez la femme
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Cette formule n’est plus appliquée car trop imprécise, notamment en cas d’altération de la fonction rénale. Toutefois, elle garde encore une place, car elle a été utilisée pour étudier la pharmacocinétique des médicaments en cas d’insuffisance rénale et peut encore servir à adapter leur posologie.

IV. Circonstances au cours desquelles il convient d’estimer le DFG (ou dépistage d’une maladie rénale) (ALD 19 : Maladie Rénale Chronique de l’adulte, HAS 2021) (A)

Les facteurs de risque retenus pour le dépistage par une estimation du DFG sont :

diabète ;

HTA traitée ou non ;

âge > 60 ans ;

obésité (IMC > 30 kg/m2) ;

maladie cardiovasculaire athéromateuse ;

insuffisance cardiaque ;

maladie de système ou auto-immune (lupus, vascularite, polyarthrite rhumatoïde) ;

affection urologique (uropathie obstructive, infections urinaires récidivantes, etc.) ;

antécédents familiaux de maladie rénale ;

antécédents de néphropathie aiguë ;

exposition à des toxiques professionnels (plomb, cadmium, mercure) ;

traitements néphrotoxiques antérieurs (médicaments néphrotoxiques, en particulier AINS, exposition aux produits de contraste iodés, chimiothérapie, radiothérapie, etc.).

V. Savoir apprécier le caractère ancien ou récent de l’élévation de la créatininémie (distinguer insuffisance rénale aiguë et chronique) (A)

Devant une élévation de la créatininémie, la première étape consiste à préciser le caractère récent (aigu) ou ancien (chronique) de l’insuffisance rénale.

En faveur du caractère chronique de l’insuffisance rénale, il existe 3 critères :

critères anamnestiques :

antécédent de maladie rénale,

notion de créatininémie augmentée plusieurs mois ou années auparavant,

absence de contexte clinique exposant à l’insuffisance rénale aiguë (choc, réanimation, hypovolémie efficace, médicaments…) ;

critères morphologiques (à l’échographie) :

diminution de la taille des reins : < 10 cm à l’échographie ;

critères biologiques : deux anomalies orientent vers une IRC :

anémie normochrome normocytaire arégénérative (défaut de production d’EPO),

hypocalcémie par carence en vitamine D active (calcitriol, défaut d’hydroxylation en 1 α ).

Il existe cependant des exceptions résumées dans le tableau suivant :

Tableau 1. Les exceptions

IRC avec gros reins
ou de taille normale
Diabète (++)
Hydronéphrose bilatérale
Polykystose autosomique dominante
Amylose
Néphropathie associée au VIH (HIVAN)
IRC sans hypocalcémie Myélome
Sarcoïdose ou autre granulomatose
IRA avec hypocalcémie Rhabdomyolyse
Syndrome de lyse tumorale
IRA avec anémie Syndrome hémolytique et urémique
Choc hémorragique

Une fois cette distinction entre la nature aiguë ou chronique établie, la discussion diagnostique dépend du type d’insuffisance rénale.

VI. Arguments en faveur d’une insuffisance rénale aiguë (IRA) (A)

L’insuffisance rénale est aiguë (reins de taille normale, élévation récente de la créatininémie en quelques jours ou quelques semaines) (voir également chapitre 14, item 348, sur l’insuffisance rénale aiguë).

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Rappelons qu’aucune formule d’estimation du DFG n’est pas utilisable en cas d’IRA.

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Les causes des IRA sont classées en trois grandes catégories : IRA obstructive, IRA fonctionnelle et IRA parenchymateuse.

A. Existe-t-il un obstacle (cause post-rénale) ? (A)

Diagnostic positif :

examen clinique : notion de dysurie importante ou de mictions par regorgement à l’interrogatoire, recherche d’un globe vésical à la percussion, un gros rein ou une sensibilité des fosses lombaires à la palpation bi-manuelle ;

échographie rénale, réalisée de principe devant toute IRA : recherche d’une dilatation des cavités pyélo-calicielles.

Diagnostic étiologique : orienté par les touchers pelviens, le contact lombaire, une échographie ou un scanner :

obstacle sous-vésical : adénome de prostate, maladie du col vésical ;

obstacle sus-vésical : cancer de la prostate par envahissement du trigone, du col de l’utérus, lithiase bilatérale, fibrose rétropéritonéale, syndrome de la jonction.

B. L’IRA est-elle de nature fonctionnelle (cause pré-rénale) ? (A)

Correspond à un état d’hypovolémie vraie ou efficace :

situation fréquente ++.

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Attention : si la situation d’hypovolémie vraie ou efficace se prolonge, l’insuffisance rénale peut devenir organique (nécrose tubulaire aiguë).

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Diagnostic positif :

contexte clinique :

hypovolémie vraie,

 hypotension artérielle : déshydratation extracellulaire (perte de poids, pli cutané) ou globale, hémorragie,

 avant le stade d’hypotension : rechercher une hypotension orthostatique (++),

hypovolémie efficace (situations où la pression de perfusion rénale est basse sans hypovolémie vraie) :

 états œdémateux majeurs au cours des hypoprotidémies (syndrome néphrotique, insuffisance hépatocellulaire, dénutrition), cirrhoses en décompensation œdémato-ascitique, insuffisance cardiaque globale ou droite,

 chocs septiques, anaphylactique ou cardiogénique à la phase initiale,

 médicaments interférant avec la régulation de l’hémodynamique rénale : anti-inflammatoires non stéroïdiens, inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, ou antagonistes du récepteur de l’angiotensine 2…

Arguments biologiques (cf. chapitre 14, item 348) (B) :

rapport (1 000 × urée plasmatique mmol/L/créatininémie µmol/L) > 100 ;

indices traduisant des urines concentrées :

U/P osmolaire > 2,

U/P urée > 10,

U/P créatinine > 30 ;

Na urinaire < 20 mmol/L, fraction d’excrétion du Na < 1 % (sauf en cas de pertes rénales de sodium, par exemple lors de l’instauration d’un traitement diurétique) ;

fraction excrétée d’urée basse (< 35 %) témoin de l’augmentation de sa réabsorption tubulaire ;

inversion du rapport Na/K urinaire (hyperaldostéronisme secondaire).

Une fois les étapes A (Obstacle) et B (IRA fonctionnelle) éliminées, l’IRA est probablement organique.

C. L’IRA est-elle organique (parenchymateuse) ? (A)

Le plus souvent, il s’agit d’une nécrose tubulaire aiguë. Les causes moins fréquentes d’IRA sont les causes glomérulaires, interstitielles et vasculaires, pour ces 3 dernières atteintes, le recours à la biopsie rénale sera d’une grande utilité.

Les éléments évocateurs et les principales causes d’IRA parenchymateuses sont indiqués dans le tableau 2 ci-après (l’IRA est détaillée dans le chapitre 14, item 348).

Tableau 2. Description des IRA parenchymateuses

Type d’IRA Diagnostic positif Étiologies
Nécrose
tubulaire aiguë
(≈ 80 %)
Contexte clinique évocateur
Arguments biologiques :
rapport 1 000 × urée P mmol/L/
créatinine P µmol/L < 100
urines peu concentrées :
U/Posm < 1
U/P urée < 10
U/P créatinine < 30
Na U > 40 mmol/L (FE Na > 2 %)
IRA «  nue  »
Absence de protéinurie
Absence d’anomalie du sédiment urinaire
Absence d’HTA
Hémodynamique :
États de choc
Toxiques
Rhabdomyolyse
Obstruction intra-tubulaire
IRA glomérulaire (Glomérulonéphrite = GN) (≈ 5 %) Protéinurie glomérulaire
Hématurie macroscopique ou microscopique
HTA ±
GNA post-infectieuse.
GN rapidement progressive
GN membrano-proliférative
Néphrite ­tubulo-interstitielle aiguë
(≈ 5 %)
Signes allergiques
Hyperéosinophilie
Leucocyturie aseptique
Éosinophilurie (pathognomonique)
Hématurie macroscopique
Protéinurie tubulaire
Infectieuses
Médicamenteuse immuno-allergique
Infiltration tumorale (lymphome)
Néphropathie vasculaire aiguë (≈ 10 %) HTA
Protéinurie et hématurie selon la cause
Signes associés en fonction de la cause (anémie hémolytique, orteils pourpres, multinévrite…)
Hypertension artérielle maligne
Syndrome hémolytique et urémique
Emboles de cristaux de cholestérol
Thrombose de l’artère rénale (rare)

VII. L’insuffisance rénale est chronique (IRC) (A)

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La recherche systématique de l’étiologie d’une insuffisance rénale chronique est indispensable.

La prise en charge thérapeutique est :

 toujours symptomatique : la néphroprotection s’applique quelle que soit la cause ;

 et éventuellement étiologique mais il n’existe pas toujours de traitement spécifique.

La survenue d’un épisode d’insuffisance rénale aiguë est possible au cours d’une insuffisance rénale chronique.
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L’interrogatoire recherche :

des antécédents familiaux de maladie rénale, de diabète, des antécédents personnels de diabète, d’obésité, de prématurité, d’hypertension artérielle, d’infections urinaires hautes récidivantes, d’uropathie, de maladie athéromateuse, de lithiase, de maladie systémique ou de maladie auto-immune, de goutte, de protéinurie, d’hématurie ;

la prise chronique ou intermittente de médicaments ou de substances po­ten­tiel­lement néphrotoxiques : anti-inflammatoires non stéroïdiens, antalgiques, lithium, anti-calcineurines (ciclosporine, tacrolimus), sels d’or, D-pénicillamine, certaines chimiothérapies, certains antiviraux… ;

l’exposition à des toxiques professionnels : plomb, cadmium.

L’examen clinique recherche :

une hypertension artérielle, un souffle vasculaire sur les axes artériels, la disparition de pouls périphériques ;

des œdèmes ;

des reins palpables, un obstacle urologique (globe vésical, touchers pelviens si nécessaire) ;

des signes extrarénaux de maladie systémique ou de maladie génétique (peau, articulations, yeux, audition…) ;

à la bandelette urinaire, une hématurie, une protéinurie, une leucocyturie.

Les examens paracliniques recommandés en première intention, pour le diagnostic étiologique sont les suivants :

examens biologiques sanguins :

électrophorèse des protéines sériques,

glycémie à jeun : diabète évoqué si glycémie à jeun > 1,26 g/L (7 mmol/L),

uricémie,

ionogramme (Na, K, Cl, bicarbonates) ;

examens biologiques urinaires :

protéinurie des 24 heures, ou rapport protéinurie/créatininurie sur un échantillon d’urines,

cytologie urinaire quantitative sur urines fraîches pour détecter une hématurie, une leucocyturie (numération des GR et des GB par mm3) ;

imagerie :

échographie rénale pour apprécier la taille des reins, pour rechercher une asymétrie, des contours bosselés, des gros reins polykystiques, une néphrocalcinose, des calculs, une hydronéphrose, la présence de kyste(s) ou de tumeur(s),

échographie vésicale à la recherche d’une pathologie du bas appareil, d’un résidu post-mictionnel.

Les orientations diagnostiques sont résumées dans le tableau 3.

À l’issue de cette démarche, un avis néphrologique est recommandé pour l’indication d’une biopsie rénale, pour des explorations complémentaires fonctionnelles (tubulopathie, lithiase) ou morphologiques (kystes, dysplasie), des enquêtes génétiques, des examens biologiques ciblés (électrophorèse des protéines urinaires, une immunofixation des protéines urinaires…).

Tableau 3. Orientation diagnostique devant une insuffisance rénale chronique

Arguments cliniques Arguments paracliniques
Néphropathie glomérulaire HTA
Œdèmes
ATCD de protéinurie, d’hématurie
Protéinurie glomérulaire (> 50 % albumine) de débit variable (parfois néphrotique)
Hématurie et/ou cylindres hématiques en fonction de la cause
Reins symétriques, contours réguliers
Atrophie harmonieuse à un stade évolué
Néphropathie tubulo-interstitielle HTA absente ou modérée et tardive
ATCD d’infections urinaires récidivantes, uropathie, goutte, maladie métabolique
Protéinurie de faible débit
(< 1 g/j et/ou < 50 % d’albumine)
Leucocyturie sans germes
Cylindres leucocytaires
Atrophie rénale asymétrique, contours bosselés
Atteinte
vasculaire
parenchymateuse
HTA ancienne
Facteurs
de risque cardiovasculaire
Protéinurie faible
Reins de taille symétrique
Atteinte
réno-vasculaire
HTA résistante à une trithérapie incluant un diurétique
OAP flash
Athéromatose
Protéinurie faible
Reins de taille asymétrique (petit rein du côté de la sténose)
Alcalose hypokaliémique

HTA : hypertension artérielle ; ATCD : antécédent