Bandeau
Manuel de Néphrologie 10° édition
Slogan du site
Descriptif du site
POUR EN SAVOIR PLUS

I. Épidémiologie et physiopathologie

[violet]A. Épidémiologie[/violet]

Les infections des voies urinaires sont une pathologie très fréquente, notamment chez la femme, puisque l’on estime que près de 50 % des femmes présenteront au moins une infection urinaire dans leur vie.

Les facteurs favorisant les cystites et les pyélonéphrites sont identiques. L’épidémiologie des infections urinaires est résumée dans le tableau 1.

La prostatite aiguë est exceptionnelle chez l’enfant, sa fréquence augmente avec l’âge.

La colonisation urinaire gravidique est observée au cours d’environ 5 % des grossesses. Contrairement à ce qui est observé chez les femmes qui ne sont pas enceintes, elle a tendance à persister en l’absence de traitement et se complique de PNA gravidique dans 1/3 des cas environ. Le traitement systématique des colonisations urinaires gravidiques diminue l’incidence des PNA gravidiques. La cystite gravidique affecterait environ 1 % des femmes enceintes.

Tableau 1. Épidémiologie

Sexe féminin Tout âge, mais en particulier :
en période d’activité sexuelle
pendant les grossesses
à partir de la ménopause
Sexe masculin Âge < 10 ans ou > 50 ans
Facteurs favorisants Diabète
Mictions rares, retenues, incomplètes, boissons insuffisantes
Anomalie de l’arbre urinaire anatomique ou fonctionnelle, congénitale ou acquise
Transplantation rénale

[violet]
B. Dissémination bactérienne dans l’arbre urinaire
[/violet]

La voie ascendante est la plus fréquente (95 % des cas). L’infection se fait donc le plus souvent par l’urètre. La prolifération des bactéries dans la vessie est favorisée par :

la stase urinaire : mictions peu fréquentes ou incomplètes (résidu post-mictionnel), boissons insuffisantes ;

un corps étranger : calcul ou sonde vésicale ;

la présence de glucose dans l’urine ;

la présence de facteurs de virulence spécifiques des bactéries uropathogènes.

La voie hématogène (localisation rénale d’une septicémie) est donc très rare. Les principaux micro-organismes impliqués sont :

staphylocoques blancs et dorés ;

salmonelles ;

Pseudomonas ;

Candida Albicans.

II. Entérobactéries productrices de ß-lactamase à spectre étendu (EBLSE)

Épidémiologie

Depuis le début des années 2000, on assiste à une pandémie mondiale de bactéries produisant une BLSE.

Il s’agit surtout d’entérobactéries (EBLSE) au premier rang desquelles E. coli et Klebsiella pneumoniae, et principalement d’infections nosocomiales. Cependant, la diffusion communautaire des EBLSE progresse.

Caractéristiques bactériologiques

Les BLSE sont des enzymes qui hydrolysent potentiellement toutes les β-lacta-mines à l’exclusion des carbapénèmes et des céphamycines (sous-famille de C2G comportant la céfoxitine). Les différentes BLSE hydrolysent cependant les
ß-lactamines avec des fréquences différentes :

pénicillines, amoxicilline-acide clavulanique, C1G, C2G (sauf céphamycines) et C3G sont hydrolysées par > 90 % des BLSE : ces antibiotiques ne sont donc pas utilisables le plus souvent ;

pipéracilline-tazobactam n’est pas toujours hydrolysé par les BLSE. Cet antibiotique est donc parfois utilisable en relais.

Les EBLSE expriment souvent des résistances à d’autres classes d’antibiotique. En particulier elles sont souvent aussi résistantes aux fluoroquinolones et au cotrimoxazole.

Les BLSE sont souvent portées par des plasmides qui peuvent facilement se transmettre d’une entérobactérie à une autre au sein du tube digestif. Les mesures d’isolement prophylactique et d’hygiène des mains sont donc fondamentales pour limiter la propagation des EBLSE à l’hôpital.

Facteurs de risque d’infection avec une EBLSE :

colonisation urinaire ou IU à EBLSE dans les 6 mois précédents ;

antibiothérapie par pénicilline et inhibiteur de pénicillinase, céphalosporine de 2e ou 3e génération, ou fluoroquinolone dans les 6 mois précédents ;

voyage récent en zone d’endémie d’EBLSE : Asie du sud-Est (Inde en particulier), Moyen Orient (Israël), Afrique, Italie, Grèce, Portugal ;

hospitalisation dans les 3 mois précédents ou vie en établissement de long séjour.

Conséquences thérapeutiques

Le risque d’infection à EBLSE doit être pris en compte pour le choix de l’antibiothérapie empirique (avant réception de l’antibiogramme) en cas d’IU grave : carbapénème et amikacine.

Après réception de l’antibiogramme, l’antibiothérapie doit systématiquement être modifiée pour réduire son spectre et en particulier éviter l’utilisation des carbapénèmes chaque fois que cela est possible (pipéracilline et tazobactam, lorsque la bactérie est sensible).

La durée de l’antibiothérapie ne doit pas être modifiée. En effet, les IU dues à EBLSE ne sont pas intrinsèquement plus graves, les options thérapeutiques sont juste plus limitées (moins d’antibiotiques efficaces).