Protéinurie et syndrome néphrotique - Article complet PDF
Article mis en ligne le 12 décembre 2020
dernière modification le 12 avril 2021

Item 259

Protéinurie et syndrome néphrotique

N° 259. Protéinurie et syndrome néphrotique de l’adulte et de l’enfant

OBJECTIFS

Devant la découverte d’une protéinurie, argumenter les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents

Devant un syndrome néphrotique chez l’enfant ou chez l’adulte, argumenter les hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents

Argumenter les principes du traitement symptomatique et de la surveillance du syndrome néphrotique et de ses complications

RangRubriqueIntituléDescriptif
A Définition Connaître la définition protéinurie physiologique
A Définition Connaître la définition protéinurie pathologique Connaître les seuils d’albuminurie
A Diagnostic positif Connaître les méthodes d’analyses d’une protéinurie
A Définition Connaître la définition du syndrome néphrotique
[fond gris]B [fond gris]Éléments physiopathologiques [fond gris]Savoir la physiopathologie du syndrome néphrotique
A Diagnostic positif Connaître l’évaluation initiale d’un syndrome néphrotique chez l’adulteet chez l’enfant
A Diagnostic positif Connaître les complications aiguës et chroniques du syndrome néphrotique
[fond gris]B [fond gris]Éléments physiopathologiques [fond gris]Connaître les mécanismes des œdèmes du syndrome néphrotique
[fond gris]B [fond gris]Prise en charge [fond gris]Connaître les principes des traitements symptomatiques d’un syndrome néphrotique
[fond gris]B [fond gris]Examens complémentaires [fond gris]Connaître l’enquête étiologique d’une protéinurie, d’un syndrome néphrotique, indications biopsie rénale chez l’adulte et chez l’enfant
[fond gris]B [fond gris]Diagnostic positif [fond gris]Savoir les principales causes de syndrome néphrotique

I. Protéinurie

A. Protéinurie physiologique (100 à 150 mg, soit < 0,2 g/j)

Chaque jour, 10 à 15 kg de protéines sériques traversent le rein, mais seulement 100 à 150 mg sont excrétés dans l’urine des 24 heures.

La paroi du capillaire glomérulaire s’oppose en effet à la filtration des principales protéines, et le tubule proximal réabsorbe la grande majorité des protéines physiologiquement filtrées en raison de leur faible poids moléculaire (< 70 kD).

À l’état normal, seules les protéines de faible poids moléculaire sont librement filtrées. La protéinurie physiologique est donc composée de :

60 % de protéines de faibles poids moléculaire (lysozyme, β-2 microglobuline et chaînes légères kappa et lambda) ;

40 % de protéines secrétées par le tubule (uromoduline ou protéine de Tamm-Horsfall) ou par l’urothélium des voies urinaires).

Dans les conditions physiologiques, la quantité d’albumine présente dans l’urine est inférieure à 15-30 mg/j.

B. Protéinuries pathologiques

[violet]1. Définition[/violet]

La protéinurie correspond à une élimination urinaire anormale en débit et en qualité de protéines. L’albumine est la principale protéine présente dans les urines en cas de lésions glomérulaires. La proportion d’albumine correspond à environ 60 à 80 % de la protéinurie totale.

Tableau 1 : Définitions des seuils pathologiques de l’albuminurie et de la protéinurie

.Urines des 24 h
(mg/24 h)
RAC ou RPC
(mg/mmol)
RAC ou RPC
(mg/g)
Albuminurie normale < 30 < 3 < 30
Microalbuminurie 30-300 3-30 30-300
Albuminurie > 300 > 30 > 300
« Protéinurie Clinique » > 500 > 50 > 500

RAC = Rapport Albumine/créatinine urinaire

RPC = Rapport Protéines/créatinine urinaire

Une protéinurie > 500 mg /24 h correspond approximativement à l’excrétion de 300 mg/24 h d’albumine (70 % des protéines urinaires) et à une + d’albumine à la bandelette urinaire.

Le terme de microalbuminurie est consacré par l’usage et correspond à une concentration urinaire faible d’albumine dans les urines détectée par des méthodes spéciales (néphélométrie laser).

L’excrétion urinaire de créatinine chez un adulte est approximativement de 1 g/j, soit 8,84 mmol. Cette valeur est arrondie à 10 pour l’estimation de la protéinurie des 24 h.

Exemple : protéinurie/créatininurie = 700 mg/mmol. On estime la protéinurie de 24 h à 700 × 10 = 7 g/j ou 7 g/g de créatinine.

[violet]2. Analyse quantitative[/violet]

Méthode semi-quantitative  : la bandelette urinaire.

C’est la technique de dépistage la plus utilisée ; elle détecte la présence d’albumine lorsque celle-ci dépasse 50-100 mg/L.

Cette méthode ne détecte pas les chaînes légères d’immunoglobulines, ni les autres protéines de bas poids moléculaire.

Interprétation de la bandelette :

Résultat normal ou non significatif : absence de protéinurie, traces ou 1 + (< 0,3 g/L),

Résultats anormaux : 2 + (environ 1 g/L) ou 3 + (environ 3 g/L).

Dosage pondéral de la protéinurie :

il est exprimé :

en g/24 heures,

de plus en plus sur un échantillon d’urine par le rapport protéinurie/créatininurie (tableau 1).

L’existence d’une hématurie ou d’une pyurie abondante peut gêner l’interprétation de la protéinurie. Une hématurie macroscopique (et non une hématurie microscopique) est à l’origine d’une protéinurie abondante (1-2 g/j, du fait de l’hémolyse des hématies dans l’urine).

[violet]3. Analyse qualitative[/violet]

Électrophorèse des protéines urinaires

Elle permet une étude qualitative de la protéinurie, utile pour caractériser son origine :

protéinurie glomérulaire  : constituée majoritairement d’albumine (> 60 %),

protéinuries tubulaires : constituée essentiellement de protéines de petits poids moléculaires. [fond gris] Elles résultent d’un trouble de réabsorption tubulaire proximale. Par exemple la lysozymurie (15 kD) et la b2-microglobulinurie (12kD). Les protéinuries tubulaires isolées sont rares et accompagnent le syndrome de Fanconi (dysfonction tubulaire proximal),

[fond gris]protéinuries dites «  de surcharge  » : résultent d’une augmentation de synthèse (chaîne légère Kappa ou Lambda au cours des dysglobulinémies – myélome multiple, amylose AL) ou de libération (myoglobine dans la rhabdomyolyse) et d’un dépassement des capacités de réabsorption tubulaire.

[fond gris]L’immunofixation des protéines urinaires est nécessaire pour caractériser la protéine monoclonale en cause (chaîne légère Kappa ou Lambda).

Microalbuminurie (ou albuminurie modérement augmentée)  :

C’est un marqueur de glomérulopathie diabétique débutante  ; sa mesure doit être effectuée une fois par an chez les patients atteints de diabète de type 1 ou 2.

Dans la population générale, la microalbuminurie est également un marqueur indépendant de risque cardio-vasculaire élevé, notamment chez les patients hypertendus. Elle témoigne chez ces patients d’une dysfonction endothéliale.

[fond gris]C. Situations cliniques en dehors du syndrome néphrotique

[violet][fond gris]1. Protéinuries intermittentes ou transitoires[/violet]

[fond gris] Il s’agit de protéinuries associées à certaines circonstances physiologiques ou pathologiques :

[fond gris] protéinurie orthostatique (voir ci-dessous) ;

[fond gris]protéinurie d’effort, observée au décours d’un exercice physique intense et prolongé ;

[fond gris]fièvre élevée ;

[fond gris] infections de l’appareil urinaire ;

[fond gris]insuffisance ventriculaire droite ;

[fond gris]polyglobulie.

[fond gris]La protéinurie orthostatique s’observe en période pubertaire (12-16 ans) et disparaît spontanément à la fin de la puberté, en tout cas avant l’âge de 20 ans. Elle est caractérisée par la disparition de la protéinurie en clinostatisme (urines recueillies après 2 heures de repos en décubitus dorsal). La protéinurie orthostatique n’est pas pathologique et ne nécessite aucun examen complémentaire une fois confirmée.

[violet]2. Protéinuries permanentes[/violet]

Les orientations diagnostiques dépendent du débit urinaire de la protéinurie, de sa composition et des anomalies associées (HTA, hématurie, insuffisance rénale, anomalies échographiques). L’arbre diagnostique est résumé dans la figure 1.

Un avis néphrologique doit être sollicité en présence d’une protéinurie permanente > 0,5 g/j.

[fond gris]Une maladie glomérulaire peut se surajouter à une néphropathie interstitielle ou vasculaire (par exemple, c’est le cas des lésions de hyalinose qui se développent après réduction néphronique, au cours des reflux vésico-urétéraux notamment).

Hématurie

Figure 1. Conduite à tenir devant une protéinurie asymptomatique

II. Syndrome néphrotique


A. Définition

Le syndrome néphrotique a une définition strictement biologique qui associe :

une protéinurie supérieure à 3 g/24 heures chez l’adulte (> 50 mg/kg/j ou 2 g/g chez l’enfant) ;

une hypoalbuminémie inférieure à 30 g/L.

Le syndrome néphrotique est qualifié de pur s’il n’est accompagné :

ni d’hématurie microscopique  ;

ni d’hypertension artérielle  ;

ni d’insuffisance rénale organique, qui peut être initialement difficile à distinguer d’une insuffisance rénale fonctionnelle.

Le syndrome néphrotique est qualifié d’impur s’il est associé à un ou plusieurs des signes précédents.

B. Physiopathologie du syndrome néphrotique

[fond gris] Le passage d’une grande quantité d’albumine dans l’urine résulte d’un trouble de la perméabilité capillaire glomérulaire lié à :

[fond gris]une anomalie de la structure de la membrane basale glomérulaire par exemple dans le syndrome d’Alport,

[fond gris]une perte des charges électronégatives de la membrane basale glomérulaire : dans le syndrome néphrotique à lésions glomérulaires minimes (SNLGM). Un facteur circulant est également suspecté dans les SNLGM, notamment dans sa forme caricaturale qui récidive après transplantation rénale,

[fond gris]des dépôts de protéines dans les glomérules au cours de la glomérulonéphrite extramembraneuse et des amyloses (voir «  Pour en savoir plus  »),

[fond gris]une altération des podocytes,

[fond gris]une altération de l’endothélium au cours des microangiopathies thrombotiques.

La protéinurie du syndrome néphrotique contient essentiellement de l’albumine ou des protéines de poids moléculaire supérieur à l’albumine :

la fuite urinaire d’albumine dépasse les capacités de synthèse hépatique, provoquant ainsi une hypoalbuminémie,

la symptomatologie clinique est dominée par le syndrome œdémateux.

C. Le diagnostic positif de syndrome néphrotique

Il est en général aisé chez l’adulte et sera évoqué dans deux circonstances principales :

l’installation explosive ou progressive d’un syndrome œdémateux ;

la découverte d’une protéinurie abondante lors d’un examen systématique (médecine du travail, médecine scolaire).

[violet]1. Tableau clinique[/violet]

a. Les œdèmes

Ils dominent le tableau clinique :

Ils sont mous, blancs, indolores et prennent le godet.

Ils prédominent dans les territoires déclives (chevilles, et jambes en position debout, lombes et dos chez un sujet en décubitus dorsal) et dans les régions où la pression extravasculaire est faible (orbite de l’œil).

Un épanchement des séreuses de type transsudatif (plèvre, péricarde, péritoine) peut être observé, réalisant une anasarque. L’œdème pulmonaire est exceptionnel en l’absence d’insuffisance cardiaque.

La prise de poids est constante et permet de chiffrer l’importance de la rétention hydrosodée.

En cas d’installation aiguë, le syndrome œdémateux peut être associé à une oligurie.

La pression artérielle est variable et dépend de la cause du syndrome néphrotique et de l’association éventuelle à une insuffisance rénale organique.

Enfin l’absence de syndrome œdémateux n’écarte pas le diagnostic de syndrome néphrotique, surtout chez les patients suivant un régime sans sel, ou traités par diurétiques au préalable.

[violet][fond gris]b. Mécanismes des œdèmes du syndrome néphrotique[/violet]

[fond gris]Les œdèmes du syndrome néphrotique reflètent deux anomalies fondamentales : une rétention rénale de sodium et une diminution de la pression oncotique plasmatique qui favorise le passage de sodium et d’eau vers le secteur interstitiel. Une hypovolémie efficace peut être éventuellement observée, elle stimule les systèmes participant à la rétention hydrosodée (système rénine-angiotensine et système sympathique) (cf. pour en savoir plus et le chapitre 9 «  œdèmes  »).

[violet][fond gris]c. Le traitement du syndrome œdémateux[/violet]

Il repose sur :

une restriction sodée (2-4 g de NaCl/j soit 34-68 mEq de sodium) ;

la prescription de diurétiques de l’anse (Furosémide ou Bumétanide).

Selon la réponse obtenue, appréciée sur le poids, le volume d’urine et la natriurèse/24 heures, le diurétique est utilisé à posologie croissante en 2 à 3 prises par jour ;

[fond gris]en cas de résistance, les autres sites distaux de rétention du sodium peuvent être bloqués sous surveillance étroite (kaliémie et volémie) en associant d’autres diurétiques agissant au niveau :

[fond gris]du tubule collecteur (amiloride®),

[fond gris]du tube contourné distal (diurétique thiazidique type hydrochlorothiazide, indapamide) ;

L’obtention d’une réponse natriurétique doit être progressive pour éviter la survenue d’une hypovolémie et les risques de thromboses veineuses (dues à l’hémoconcentration) ;

En l’absence d’hyponatrémie, il n’y a pas lieu de restreindre les apports hydriques

Le recours à des perfusions d’albumine est réservé aux situations exceptionnelles d’hypotension symptomatique.

[violet]2. Examens biologiques[/violet]

a. Dans les urines

La protéinurie, éventuellement détectée par l’usage de bandelettes urinaires au lit du malade est confirmée au laboratoire. Elle est permanente et abondante (> 3 g/24 heures).

L’analyse du sédiment urinaire permet de rechercher l’association à une hématurie microscopique.

L’examen du culot urinaire recherche des cylindres hématiques, qui signent l’origine glomérulaire de l’hématurie.

b. Dans le sang

Il existe une hypoalbuminémie < 30 g/L.

L’analyse de l’électrophorèse des protéines montre une modification de la répartition des globulines avec :

une élévation des α2-globulines, des β-globulines et du fibrinogène ;

une diminution des gammaglobulines.

L’hyperlipidémie est fréquente avec une élévation des taux de cholestérol et de triglycérides.

L’hypoprotidémie est associée à une hypocalcémie par diminution de la fraction du calcium lié à l’albumine.

La créatininémie varie en fonction de la cause du syndrome néphrotique et de l’association possible à une insuffisance rénale organique ou fonctionnelle.

[violet]3. Diagnostic différentiel[/violet]

Il faut distinguer le syndrome néphrotique des autres causes d’œdèmes généralisés sans protéinurie :

avec rétention sodée (cirrhose, insuffisance cardiaque, péricardite constrictive) ; dans un faible nombre de cas, l’insuffisance cardiaque droite sévère ou la cirrhose peuvent être associées à une protéinurie ;

des autres causes d’hypoprotidémie ou le mécanisme des œdèmes est incertain : malabsorption, dénutrition…

4. Conduite à tenir

Devant un syndrome néphrotique, il faut :

Établir le caractère pur ou impur du syndrome néphrotique.

Étudier les modalités d’installation et l’ancienneté des œdèmes (quelques jours ou plusieurs semaines).

Rechercher un facteur déclenchant :

prise de certains médicaments (prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens, lithium, interféron…),

vaccination,

syndrome infectieux récent.

Rechercher des signes «  extrarénaux  » évoquant une maladie générale :

angine,

purpura, lésions cutanées,

arthralgies.

adénopathies…

D. Complications du syndrome néphrotique

++ + En plus des œdèmes (révélateurs du SN), on distingue les complications aiguës et chroniques.

[violet]1. Les complications aiguës[/violet]

a. Insuffisance rénale aiguë

Insuffisance rénale fonctionnelle, par hypovolémie relative, banale à la phase initiale d’un syndrome néphrotique. La natriurèse est inférieure à 20 mmol/L.

Nécrose tubulaire aiguë, parfois avec oligoanurie compliquant certains syndromes néphrotiques de l’enfant ou du sujet âgé, dans les situations associées à une hypovolémie sévère et prolongée.

Thrombose uni ou bilatérale des veines rénales : notamment au cours des glomérulonéphrites extra-membraneuses ou de l’amylose. Il faut l’évoquer en cas de douleur lombaire uni ou bilatérale, ou d’hématurie macroscopique. L’insuffisance rénale est inconstante. Le diagnostic repose sur l’imagerie (doppler, TDM ou angio-IRM). La thrombose peut s’étendre à la veine cave inférieure et se compliquer d’embolie pulmonaire.

b. Thromboses vasculaires et anomalies de la coagulation

Mécanismes :

Les pertes urinaires de facteurs anticoagulants (antithrombine III, Protéine S…) et la synthèse accrue des facteurs procoagulant (facteur V, VIII, fibrinogène…) provoque un état d’hypercoagulabilité.

Clinique :

Les thromboses vasculaires concernent tous les territoires, veineux surtout et artériels. Elles sont plus fréquentes chez l’adulte que chez l’enfant.

Les thromboses veineuses peuvent se compliquer d’embolie pulmonaire.

Deux variétés de thrombose veineuse méritent une mention particulière :

la rare thrombose d’un sinus veineux cérébral,

la thrombose d’une ou des deux veines rénales.

[fond gris]Traitement et prévention :

[fond gris]traitement curatif d’une thrombose veineuse ou d’une embolie pulmonaire :

[fond gris] selon les modalités habituelles (HBPM en l’absence d’insuffisance rénale ou héparine, puis AVK) ; prolongé aussi longtemps que le syndrome néphrotique persiste ; avec un objectif d’INR entre 2 et 3,

[fond gris] équilibration du traitement par anti-vitamine K difficile en raison d’anomalies pharmacocinétiques (liaison à l’albumine, et donc augmentation de la forme libre),

[fond gris]traitement curatif d’une thrombose artérielle : embolectomie ou héparine + aspirine.

[fond gris]Traitement préventif des thromboses veineuses :

[fond gris]éviter l’immobilisation prolongée, bas de contention…,

éviter la déplétion hydrosodée brutale (> 1 à 2 kg/j),

prescrire un traitement anticoagulant si l’hypoalbuminémie est profonde (< 20 g/L) et durable.

c. Complications infectieuses

Elles sont favorisées par l’hypogammaglobulinémie, notamment pour les bactéries encapsulées (Pneumocoque, Haemophilus, Klebsielle).

Les tableaux cliniques sont :

une infection cutanée (érysipèle) qui peut prendre très vite l’aspect de cellulite accompagnée d’un sepsis grave, notamment chez les patients ayant un syndrome œdémateux majeur. Les érosions cutanées spontanées ou les points de ponction veineuse sont les portes d’entrée usuelles ;

la péritonite primitive qui s’observe chez les enfants atteints de syndrome néphrotique :

douleur abdominale aiguë fébrile,

le diagnostic repose sur la ponction d’ascite.

Les autres complications infectieuses sont également possibles.

Les vaccinations anti-grippales et anti-pneumococciques doivent être réalisées, l’antibioprophylaxie n’est pas indiquée. Corticothérapie et immunosuppresseurs contre-indiquent les vaccins vivants.

[violet]
2. Les complications chroniques[/violet]

a. Hyperlipidémie

Elle est de type mixte le plus souvent.

L’hypercholestérolémie peut être très importante (> 10 mmol/L-). Elle est athérogène avec élévation du LDL-C.

Elle est liée à une augmentation de la production des lipoprotéines au niveau du foie (VLDL et LDL) et à une diminution de leur catabolisme.

Elle est corrélée à la sévérité du syndrome néphrotique.

L’hyperlipidémie sévère augmente le risque d’événements cardio-vasculaires.

[fond gris] Le traitement de l’hyperlipidémie n’est indiqué qu’en cas de syndrome néphrotique durable (> 6 mois) résistant au traitement spécifique (hyalinose segmentaire et focale, glomérulopathie extramembraneuse). Il fait appel à l’utilisation des statines sous contrôle des CPK (risque accru de rhabdomyolyse) et à posologie progressivement croissante.

[violet]b. Hypertension artérielle[/violet]

Elle est très fréquente au cours des glomérulonéphrites chroniques.

L’objectif est de ramener la pression artérielle en dessous de 130/80 mmHg.

Elle nécessite un traitement incluant en première ligne un IEC ou un ARA2, puis un diurétique.

[violet]c. Insuffisance rénale chronique[/violet]

[fond gris] Risque lié :

[fond gris] au type de glomérulopathie ;

[fond gris] à un effet néphrotoxique direct de la protéinurie sur l’épithélium tubulaire qui favorise la fibrose interstitielle ;

[fond gris] à l’HTA non contrôlée.

[fond gris] Traitement «  néphroprotecteur  » non spécifique (voir chapitre insuffisance rénale chronique) :

[fond gris] objectifs PA < 130/80 mmHg et protéinurie < 0,5 g/j ;

[fond gris] moyens :

[fond gris] régime limité en sel < 6 g/j,

[fond gris] utilisation de bloqueurs du système rénine angiotensine : la mise en route d’un traitement néphroprotecteur (IEC/ARA2) se conçoit en cas de syndrome néphrotique durable n’entrant pas en rémission rapidement sous traitement spécifique (pas d’indication par exemple au cours du SNLGM corticosensible en quelques jours ou semaines).

Figure 2. Mécanismes physiopathologiques des complications du syndrome néphrotique

d. Dénutrition et troubles de croissance

La dénutrition protidique est fréquente au cours des syndromes néphrotiques chroniques.

Une atrophie musculaire est souvent observée à la disparition des œdèmes après corticothérapie prolongée.

Un régime «  normal  » en protéines, apportant 1-1,5 g/kg/j de protéines est suffisant.

Chez l’enfant, le retard de croissance est principalement imputable à la corticothérapie. L’impact de la corticothérapie est particulièrement important au pic de croissance pubertaire, qui est totalement bloqué. D’autres traitements immunosuppresseurs doivent être discutés durant dans cette période.

e. L’augmentation de la fraction libre plasmatique des médicaments liés à ­l’albumine

La baisse de l’albumine sérique est directement responsable de l’augmentation de la fraction libre des médicaments (anti-vitamines K, anti-inflammatoires non stéroïdiens, statines…). Le risque de surdosage et d’effet toxique est augmenté.

f. [fond gris] Autres anomalies métaboliques (syndrome néphrotique prolongé)

[fond gris] Baisse de métaux éléments (fer, cuivre, zinc), de protéines porteuses (Vitamin-D binding protein, thyroxin binding globulin céruléoplasmine, transferrine) entraînant par exemple une carence en vitamine D ou une hypothyroïdie.

Les mécanismes impliqués dans la physiopathologie des complications du syndrome néphrotique sont résumés dans la figure 2.

E. Diagnostic étiologique : éléments d’orientation

[fond gris] Quand faut-il proposer une biopsie rénale en présence d’un syndrome néphrotique ? En pratique, la biopsie rénale est toujours indispensable sauf :

[fond gris] chez l’enfant entre 1 et 10 ans si le syndrome néphrotique est pur et qu’il n’y a pas de signes extrarénaux : par argument de fréquence, il s’agit d’un syndrome néphrotique à lésions glomérulaires minimes (néphrose lipoïdique) ;

[fond gris] chez le patient diabétique de longue date ayant une rétinopathie diabétique et un syndrome néphrotique sans hématurie : par argument de fréquence, il s’agit d’un syndrome néphrotique par glomérulopathie diabétique ;

[fond gris] chez l’adulte suspect d’amylose si la biopsie des glandes salivaires accessoires établit ce diagnostic : l’amylose est une maladie systémique, diffuse, et le syndrome néphrotique est dû à des dépôts semblables à ceux observés dans les glandes salivaires ;

[fond gris] en cas de glomérulopathie héréditaire déjà identifiée dans la famille, si aucun traitement spécifique n’est à proposer ;

[fond gris] en cas de dangerosité de la biopsie (rein unique, trouble de l’hémostase…).

[fond gris] De façon schématique, on distingue les syndromes néphrotiques primitifs et secondaires :

[fond gris] un syndrome néphrotique est dit primitif ou idiopathique si l’enquête étiologique s’avère négative (il n’y a pas cause évidente, et pas de signes extra-rénaux). Les néphropathies glomérulaires primitives sont alors définies selon leur type histologique ; chez l’adulte, les deux causes les plus fréquentes de syndrome néphrotique primitif sont la glomérulopathie extra-membraneuse et le syndrome néphrotique idiopathique (qui inclut le SNLGM et les hyalinoses segmentaires et focales primitives),

[fond gris] un syndrome néphrotique est secondaire si la néphropathie glomérulaire est la conséquence d’une maladie générale (diabète, lupus, amylose…), infectieuse, toxique ou tumorale.

[fond gris] Les causes de syndromes néphrotiques secondaires sont nombreuses

(tableau 2).Principales causes des syndromes néphrotiques secondaires

[fond gris] Maladie générale
  • [fond gris] Diabète
  • [fond gris] Lupus érythémateux disséminé
  • [fond gris] Cryoglobulinémie
  • [fond gris] Amylose AL primitive, ou au cours d’un myélome
  • [fond gris] Amylose AA secondaire à une maladie inflammatoire chronique
[fond gris] Infections
  • [fond gris] Virus de l’hépatite B ou de l’hépatite C
  • [fond gris] VIH
  • [fond gris] Glomérulonéphrite aiguë post-infectieuse (streptocoque, pneumocoque)
  • [fond gris] Infection d’un shunt atrio-ventriculaire
  • [fond gris] Autres : paludisme, syphilis, bilharziose
[fond gris] Cancers et hémopathies
  • [fond gris] Tumeurs solides (cancer pulmonaire) -*[fond gris] Hémopathies (myélome multiple, lymphome non-hodgkininen)
  • [fond gris] Gammapathie monoclonale isolée
  • [fond gris] Cryoglobulinémie
[fond gris] Médicaments -*[fond gris] Anti-inflammatoires non stéroïdiensb -*[fond gris] Lithium -*D-pénicillamine

  • [fond gris] Traitements anti-VEGF
[fond gris] Autres causes [fond gris]-*Pré-éclampsie