Vascularites Systémiques
Article mis en ligne le 14 avril 2021

N° 193. Vascularites systémiques

Objectif

Connaître les principaux types de vascularite systémique, les organes cibles, les outils diagnostiques et les moyens thérapeutiques

Rang Rubrique Intitulé Descriptif
A Définition Connaître la définition d’une vascularite systémique .
[fond gris] B [fond gris] Définition [fond gris] Connaître les principaux types de vascularites systémiques [fond gris] Gros, moyen, petit calibre ; ACG, Takayasu, vascularites ANCA, Vascularite IgA, PAN, Kawasaki, Behçet
A Diagnostic positif Connaître les principaux signes évocateurs du diagnostic de vascularite Signes généraux, atteinte des vaisseaux de gros calibre, signes cutanés
[fond gris] B [fond gris] Diagnostic positif [fond gris] Connaître les principaux diagnostics différentiels à évoquer en cas de suspicion de vascularite [fond gris] Infections, cause toxique ou médicamenteuse, cancer, hémopathie, vascularites secondaires
[fond gris] B [fond gris] Diagnostic positif [fond gris] Connaître les organes cibles et les moyens diagnostiques .
A Diagnostic positif Connaitre les caractéristiques cliniques d’un purpura vasculaire .
[fond gris] B [fond gris] Multimedia [fond gris] Reconnaître un purpura vasculaire [fond gris] Photographie d’un purpura vasculaire
[fond gris] B [fond gris] Examens complémentaires [fond gris] Connaître les principaux examens à réaliser en cas de suspicion de vascularite [fond gris] Syndrome inflammatoire, recherche d’ANCA, biopsie
[fond gris] B [fond gris] Examens complémentaires [fond gris] Connaître les principaux examens immunologiques à réaliser en cas de suspicion de vascularite [fond gris] ANCA, cryoglobulinémie
[fond gris] B [fond gris] Prise en charge [fond gris] Connaître les principes de la prise en charge des vascularites [fond gris] Principes généraux uniquement, pas de nom de molécule ni de dose
[fond gris] B [fond gris] Suivi et/ou pronostic [fond gris] Connaître les principaux facteurs pronostiques des vascularites

I. Définition d’une vascularite systémique

Les vascularites systémiques sont un groupe hétérogène de maladies définies par une inflammation de la paroi des vaisseaux sanguins artériels, veineux et/ou capillaires, résultat le plus souvent d’une agression auto-immune. L’inflammation systémique, mais aussi la sténose ou l’occlusion de la lumière vasculaire par une atteinte endothéliale, une thrombose ou une prolifération intimale (conduisant parfois à l’ischémie tissulaire en aval de l’atteinte vasculaire), sont à l’origine des manifestations cliniques rencontrées dans ces pathologies.

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II. Les principaux types de vascularite systémique

[fond gris] Les vascularites systémiques regroupent un grand nombre de pathologies, chacune caractérisées par des critères cliniques et histologiques distincts. La nomenclature de Chapel Hill, révisée en 2012, s’est imposée comme le système de classification de référence, basée sur la taille des principaux vaisseaux atteints dans chacune de ces maladies (figure 6).

Figure 6. Causes de vascularites selon la topographie des vaisseaux

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On peut ainsi distinguer (figure 6) :

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Les vascularites des vaisseaux de gros calibre (aorte et ses branches de division), incluant l’artérite de Takayasu et l’artérite à cellules géantes (anciennement maladie de Horton) ;

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Les vascularites des vaisseaux de moyen calibre (principales artères viscérales et leurs branches de division), incluant la péri-artérite noueuse (PAN) et la maladie de Kawasaki ;

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Les vascularites des vaisseaux de petit calibre (artérioles, capillaires et veinules), comportant les vascularites associées aux anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA), la maladie des anticorps anti-membrane basale glomérulaire (anciennement syndrome de Goodpasture), et les vascularites par dépôts de complexes immuns.

[fond gris] Les vascularites à ANCA comportent la granulomatose avec polyangéite (GPA) (anciennement granulomatose de Wegener), la granulomatose éosinophilique avec polyangéite (GEPA) (anciennement syndrome de Churg-Strauss), la polyangéite microscopique (PAM).

[fond gris] Les vascularites à complexes immuns regroupent essentiellement les vascularites cryoglobulinémiques, les vascularites à IgA (anciennement purpura rhumatoïde).

[fond gris] Certaines vascularites peuvent atteindre des vaisseaux de calibre varié, telle la maladie de Behçet.

[fond gris] Les vascularites d’origine auto-immune, touchant le plus souvent plusieurs organes (systémiques) sont dites primitives. Les principaux diagnostics différentiels sont les vascularites secondaires, pouvant être en rapport avec des pathologies :

[fond gris] infectieuses (tuberculose, syphilis, aspergillus, cytomégalovirus, méningocoque, staphylocoque, rickettsie…)

[fond gris] auto-immunes (polyarthrite rhumatoïde, lupus érythémateux systémique, syndrome de Sjögren)

[fond gris] hématologiques (leucémie myélomonocytaire chronique) ou carcinologiques (vascularites paranéoplasiques).

[fond gris] toxiques (AINS, antibiotiques, levamisole…)

[fond gris] Une atteinte rénale est retrouvée essentiellement dans les vascularites atteignant les petits vaisseaux (vascularites à ANCA, maladie à anticorps anti-MBG, vascularites à complexes immuns). Plus rarement, on retrouve une atteinte des vaisseaux rénaux dans la péri-artérite noueuse et dans l’artérite de Takayasu. A contrario, il n’y a pas d’atteinte rénale dans l’artérite à cellules géantes, la maladie de Kawasaki ou la maladie de Behçet.

III. Les vascularites rénales touchant les vaisseaux de petit calibre


A. Signes cliniques évocateurs de vascularite rénale

Le mode de révélation usuel d’une vascularite rénale touchant les vaisseaux de petit calibre (et notamment le capillaire glomérulaire) est le syndrome de glomérulonéphrite rapidement progressive (GNRP) (cf. chapitre -Néphropathies Glomérulaires). Il associe insuffisance rénale d’aggravation rapide (en quelques jours ou semaines), protéinurie glomérulaire (le plus souvent modérée, non néphrotique) et hématurie constante, le plus souvent microscopique. Plus rarement, notamment dans les vascularites à complexes immuns comme la cryoglobuminémie, on peut observer un syndrome néphritique aigu (insuffisance rénale aigue, hypertension artérielle, protéinurie massive d’ordre néphrotique, hématurie macroscopique, oedèmes).

B. Signes extra-rénaux accompagnant une vascularite rénale

Le diagnostic de vascularite est souvent évoqué devant des signes cliniques évoquant l’atteinte d’autres organes :

Signes généraux  : Fièvre, anorexie, amaigrissement, arthralgies inflammatoires, myalgies, hyperleucocytose, CRP élevée

Signes pulmonaires  : Toux, dyspnée et détresse respiratoire, hémoptysies. L’imagerie thoracique révèle des infiltrats pulmonaires bilatéraux pouvant évoquer une hémorragie intra-alvéolaire, parfois des nodules pulmonaires (dans la GPA), voire une évolution vers la fibrose dans les formes chroniques. Le diagnostic d’hémorragie intra-alvéolaire peut être confirmée par un lavage broncho-alvéolaire (LBA) retrouvant des sidérophages. La sruvenue d’un asthme hyperéosinophilique est caractéristique de la GEPA.

Signes cutanés  : Purpura vasculaire, parfois nécrotique (Figure 7)

Signes ORL  : épistaxis, rhinite crouteuse, sinusite, otite, surdité

Signes ophtalmologiques  : épisclérite, masse rétro-orbitaire

Signes neurologiques  : mononévrite ou multinévrite, sensitive et/ou motrice

Signes digestifs  : douleur abdominale, perforation et hémorragie digestive

Signes cardiaques  : péricardite, myocardite

[fond gris] C. Principaux outils diagnostiques pour confirmer le diagnostic de vascularite et compléter le bilan d’extension

[bleu marine]1. Examens biologiques[/bleu marine]

[fond gris] Recherche d’ANCA (anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles) : ces auto-anticorps, pouvant également être retrouvés au cours de pathologiques infectieuses (endocardiques) ou d’autres pathologies autoimunes (maladies inflammatoires du tube digestif), sont néanmoins très évocateurs d’une vascularite dite pauci-immune (cf. infra). La recherche d’ANCA comporte une détection en immunofluorescence indirecte sur des polynucléaires fixés, distinguant un marquage cytoplasmique (c-ANCA) ou périnucléaire (p-ANCA), puis une identification de l’antigène cible grâce à un test ELISA, distinguant les ANCA anti-protéinase 3 (PR3) et anti-myélopéroxydase (MPO).

[fond gris] Recherche d’anticorps anti-membrane basale glomérulaire (MBG).

[fond gris] Dosage du complément plasmatique (C3, C4, CH50), souvent consommé dans les vascularites à complexes immuns.

[fond gris] Recherche de cryoglobuline (et typage), facteur rhumatoïde, anticorps anti-nucléaires.

[fond gris] Tests non-immunologiques : recherche de syndrome inflammatoire (élévation CRP, hyperalpha-2-globulinémie), hyperleucocytose à PNN ou a éosinophiles.

[fond gris] Explorations infectieuses : recherche de pathologies parfois associées à la vascularite (sérologie des hépatites B et C, HIV, recherche d’endocardite).
[bleu marine]
[fond gris] 2. Explorations morphologiques[/bleu marine]

[fond gris] Pulmonaires :

[fond gris] radiographie pulmonaire (face et profil).

[fond gris] scanner thoracique non injecté.

[fond gris] explorations fonctionnelles respiratoires avec DLCO.

[fond gris] fibroscopie bronchique avec lavage bronchiolo-alvéolaire (LBA) et parfois biopsies bronchiques en cas d’atteinte parenchymateuse à l’imagerie. L’hémorragie alvéolaire sera évoqué sur l’aspect macroscopique (liquide rouge ou rosé) et confirmée en pathologie (score de Golde).

[fond gris] ORL : examen spécialisé avec éventuelles biopsies des lésions ulcérées endonasales, scanner des sinus.

[fond gris] Neurologiques : électromyogramme (EMG).

[bleu marine][fond gris] 3. Examen histologique[/bleu marine]

[fond gris] Permet la confirmation de la vascularite, mais permet aussi l’identification précise du cadre nosologique (recherche de granulomes, de dépôts d’immunoglobulines et de complément)

[fond gris] Biopsie cutanée (geste le plus simple, sur les lésions purpuriques ou nécrotiques).

[fond gris] Biopsie neuromusculaire, parfois utile en cas de neuropathie ou atteinte musculaire.

[fond gris] Biopsie rénale, en cas de syndrome glomérulaire, d’hématurie microscopique, d’insuffisance rénale. Ce test permet de mettre en évidence la glomérulonéphrite proliférative extracapillaire, évocatrice d’une vascularite glomérulaire. La biopsie rénale a un rôle diagnostique (orientation du diagnostic étiologique en fonction de la présence/absence, de la topographie et du type des dépôts immuns glomérulaires) mais aussi pronostique ( la présence de lésions chroniques, fibreuses, prédit une récupération incomplète de la fonction rénale malgré la mise en route du traitement).

Figure 7. Purpura vasculaire nécrotique chez un homme de 70 ans atteint de Granulomatose avec Polyangéite

[fond gris] Les vascularites rénales, se traduisant par une GNRP, sont ainsi classées en 3 catégories (cf. chapitre 10 - Néphropathies glomérulaires pour la présentation clinique biologique et la prise en charge thérapeutique)

Un tableau à part : La vascularite cryoglobulinémique

[fond gris] Définie par la présence, dans le sérum, d’immunoglobulines précipitant au froid.

[fond gris] Manifestations cliniques :

[fond gris] La présence d’une cryoglobuline est souvent asymptomatique.

[fond gris] Manifestations systémiques (cutanée, articulaire, neurologique, digestive)

[fond gris] Atteinte rénale est révélée par un syndrome de GNRP ou de syndrome néphritique.

[fond gris] Histologiquement l’atteinte glomérulaire se traduit par une GN extracapillaire particulière, caractérisée par une prolifération endocapillaire associée et des dépôts d’immunoglobulines (IgG, IgM) et de complément.

[fond gris] La cryoglobuline peut être purement monoclonale (type 1) quand elle est associée à une maladie hématologique lymphoplasmocytaire ou comporter un composant polyclonal (type 2 = IgM monoclonale+IgG polyclonale, type 3 = IgG polyclonales), quand elle est secondaire à une infection telle que l’hépatite C ou une maladie auto-immune, telle le syndrome de Sjogren.

[fond gris] La prise en charge thérapeutique repose sur la prise en charge symptomatique (notamment de l’hypertension artérielle et de l’insuffisance rénale), le traitement de la pathologie causale (maladie hématologique, hépatite C) et parfois sur l’utilisation de corticoïdes et d’immunosuppresseurs.

IV. Les vascularites rénales touchant les vaisseaux de moyen et gros calibre

[bleu marine]1. La péri-artérite noueuse (PAN)[/bleu marine]

[fond gris] Touche les vaisseaux de moyen calibre

[fond gris] Aboutit à une occlusion artérielle (et des infarctus tissulaires secondaires) mais aussi à la constitution de microanevrysmes artériels.

[fond gris] Concerne essentiellement l’adulte de 40-60 ans, sans prédominance de sexe.

[fond gris] Manifestations cliniques :

[fond gris] Signes généraux (fièvre, altération de l’état général, signes musculo—articulaires),

[fond gris] Signes neurologiques (mono- ou multi-nevrite),

[fond gris] Signes digestifs et cardiovasculaires.

[fond gris] Atteinte rénale se manifestant par des microanevrysmes artériels intrarénaux (visibles à l’imagerie injectée) et parfois par des infarctus rénaux, sans syndrome glomérulaire, responsables d’une hypertension artérielle sévère et parfois d’une dégradation de la fonction rénale.

[fond gris] Biologie :

[fond gris] syndrome inflammatoire biologique,

[fond gris] recherche d’ANCA négative,

[fond gris] présence fréquente d’une hépatite B active.

[fond gris] La preuve histologique est parfois apportée par la biopsie neuromusculaire, alors que la biopsie rénale est contre-indiquée notamment en raison du risque hémorragique secondaire aux micro-anévrysmes.

[fond gris] La prise en charge repose sur la réalisation d’échanges plasmatiques dans les formes sévères, le traitement d’une éventuelle hépatite B associée, l’utilisation de corticoïdes et d’immunosuppresseurs.

[bleu marine][fond gris] 2. La maladie de Takayasu[/bleu marine]

[fond gris] Touche les vaisseaux de gros calibre (aorte et principales branches de division)

[fond gris] Aboutit à la constitution des sténoses et/ou des occlusions.

[fond gris] Concerne essentiellement la femme jeune, avec une nette prédisposition ethnique (prévalence accrue chez les patientes d’origine asiatique).

[fond gris] Manifestations cliniques/biologiques :

[fond gris] phase inflammatoire initiale, s’accompagnant de signes généraux et d’une élévation des marqueurs biologiques de l’inflammation,

[fond gris] phase chronique plus tardive, avec symptomatologie relative aux conséquences des altérations artérielles en fonction des territoires atteints :

[fond gris] signes neurologiques ou ophtalmologiques en cas d’atteinte des troncs supra-aortiques,

[fond gris] claudication, ischémie des membres, asymétrie des pouls et de la pression artérielle périphériques en cas d’atteinte des axes sous-claviers ou ilio-fémoraux.

[fond gris] Au plan rénal : hypertension artérielle réno-vasculaire, voire atrophie rénale en rapport avec une occlusion de l’artère rénale.

[fond gris] Au plan thérapeutique : la phase inflammatoire nécessite souvent l’introduction d’un traitement immunosuppresseur, alors que la phase chronique nécessite des gestes de revascularisation endovasculaires ou chirurgicaux.
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